Page:Hugo Rhin Hetzel tome 3.djvu/99

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aurez les archives de la cathédrale de Bâle. On arrive à ces archives par une belle grille noire, touffue, tordue et savamment brouillée, qui a quatre cents ans. Des oiseaux et des chimères sont perchés çà et là dans ce sombre feuillage de fer.

Du haut des clochers la vue est admirable. J’avais sous mes pieds, à une profondeur de trois cent cinquante pieds, le Rhin large et vert ; autour de moi le grand Bâle, devant moi le petit Bâle ; car le Rhin a fait de la ville deux morceaux ; et, comme dans toutes les villes que coupe une rivière, un côté s’est développé aux dépens de l’autre. À Paris, c’est la rive droite ; à Bâle, c’est la rive gauche. Les deux Bâle communiquent par un long pont de bois, souvent rudoyé par le Rhin, qui n’a plus de piles de pierre que d’un seul côté, et au centre duquel se découpe une jolie tourelle-guérite du quinzième siècle. Les deux villes font au Rhin des deux côtés une broderie ravissante de pignons taillés, de façades gothiques, de toits à girouettes, de tourelles et de tours. Cet ourlet d’anciennes maisons se répète sur le Rhin et s’y renverse. Le pont reflété prend l’aspect étrange d’une grande échelle couchée d’une rive à l’autre. Des bouquets d’arbres et une foule de jardins suspendus aux devantures des maisons se mêlent aux zigzags de toutes ces vieilles architectures. Les croupes des églises, les tours des enceintes fortifiées, font de gros nœuds sombres auxquels se rattachent, de temps en temps, les lignes capricieuses qui courent en tumulte des clochers aux pignons, des pignons aux lucarnes. Tout cela rit, chante, parle, jase, jaillit, rampe, coule, marche, danse, brille au milieu d’une haute clôture de montagnes qui ne s’ouvre à l’horizon que pour laisser passer le Rhin.

Je suis redescendu dans la ville, qui abonde en fantaisies exquises, en portes bien imaginées, en ferrures extravagantes, en constructions curieuses de toutes les époques. Il y a, entre autres, un grand logis qui sert aujourd’hui de hangar à un roulage, et qui a, à toutes les baies, guichets, portes, fenêtres, des nœuds gordiens de nervures, souvent tranchés par l’architecte et les plus bizarres du monde. Je n’ai rien rencontré de pareil nulle part. La pierre est là tordue et tricotée comme de l’osier. Vous pouvez voir des