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SUR L’ÉVOLUTION LITTÉRAIRE

restais silencieux ; et, comme il vit que je souriais vaguement d’un air d’incrédulité, il leva les bras et dit :

— Mais qu’est-ce que vous voulez faire ? L’adultère de l’épicière et du marchand de vin du coin ?

Puis, rêveur, les yeux au plafond :

— Ah ! oui, peut-être… chercher des exceptions rares, énormes…

Et il continua :

— Ah ! il y a bien le prêtre ! On ne l’a jamais fait, celui-là ! Mais je crains bien qu’il ne reste toujours à faire. Il faudrait l’avoir été soi-même, avoir vécu jeune de cette vie de séminaire qui vous triture le cerveau, qui vous transforme un être de fond en comble, qui fait qu’à travers les bouleversement futurs, qu’après la foi niée, la barbe poussée, la tonsure effacée, toujours se reconnaît, à un coin de la conversation, à l’esquisse d’un geste, à un son de voix, l’ancien séminariste.

Oui, il y a, dans cette existence de prêtre, quelque chose de vraiment spécial qui échappe à toute investigation étrangère, qu’il nous est, pour ainsi dire, défendu d’aborder. J’en ai connu des prêtres, d’anciens prêtres, et ces temps-ci, pour mon feuilleton Là-Bas, j’en ai fréquenté pas mal. Ils sont inanalysables. Tenez, l’un d’eux dernièrement me disait : « Moi qui vis chaste, certaines lectures me troublent, certains spectacles m’oppressent. » — « Et le confessionnal ? » lui demandai-je. — « Ho ! là, jamais rien,