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SUR L’ÉVOLUTION LITTÉRAIRE

Régnier et Charles Morice, — m’a semblé peu noble. Leur mépris pour leurs aînés et leurs camarades est chose qui me passe. Il existe pourtant, en dehors d’eux, de grands poètes, comme Maurice Bouchor. Haraucourt et Rodenbach ne sont-ils rien, non plus ?

Parlons d’autre chose, voulez-vous ? Réclame pour réclame, mieux vaut en faire à ceux dont on ne parle pas assez, qu’à ceux dont on parle de trop. Laissons de côté mes sympathies et admirations personnelles pour MM. de Goncourt et Alphonse Daudet, pour Huysmans, Lavedan, Élémir Bourges, Bonnetain, Mirbeau, Hennique, Descaves, Jules Case et J. Rosny qui mérite une épithète à part, spécifiant tout ce qu’il apporte de neuf et d’humain. Tous ces écrivains sont connus et reconnus. J’ai mieux attirer votre attention sur deux manifestations très particulières et très différentes du jeune Roman, dans la personne d’Antony Blondel et de Jean Lombard.

Voilà Blondel, par exemple ! Qui, en dehors de quelques lettrés, connaît son Camus (d’Arras), son Bonheur d’aimer ? Il va publier chez Havard un livre : le Mal moderne. La critique, complaisante aux vantards, s’intéressera-t-elle à ce modeste ? Ses romans ont, à un degré rare, l’odeur, le goût et le sens de la vie. Aucune littérature ! les sentiments et les sensations mêmes dans leur fleur ! Nul n’a mieux dépeint la plante humaine et ses dépérissements, sa lente ascension vers le jour, son épanouissement