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ENQUÊTE

fermé à ces choses, j’avoue que je ne les entends pas, mais là, pas du tout.

Simplement :

— Et je vous le dis simplement, sans la moindre aigreur, vous le sentez bien. Car j’aime la jeunesse, et j’estime que c’est toujours respectable et très noble la recherche d’une nouvelle expression d’art. Mais, sapristi ! tout de même, je veux comprendre ! Et quand je les lis, ils me font l’effet d’enfants qui essaieraient de parler, qui feraient péniblement des efforts, et qui n’y arriveraient pas… C’est comme le cochon de l’enseigne du charcutier : il ne leur manque que la parole ! Oui, je sais bien, ils parleront peut-être demain ! C’est possible, en effet. Et ce me serait une grande joie de voir sortir de tout ce chaos un poète qui parlerait vraiment, qui nous dirait quelque chose…

Il eut un long geste de résignation, et ajouta :

— Attendons !

Je demandai :

— À quelle influence attribuez-vous le mouvement symboliste ?

— Au dégoût général que tout le monde a de tout. Lamartine a dit : « La France s’ennuie. » Eh bien, à l’heure qu’il est, on peut dire : la littérature s’ennuie. Il n’y a plus que des dilettantes, voyez : cette vogue des exotismes, le succès de tout ce qui vient de l’étranger, le roman russe, le théâtre danois, cette