Page:Huysmans - A Rebours, Crès, 1922.djvu/314

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il s’acheminait, à certaines heures, ne pouvait même être discuté avec un prêtre qui ne l’eût pas compris ou l’eût aussitôt banni avec horreur.

Pour la vingtième fois, cet irrésoluble problème l’agitait. Il eût voulu que cet état de suspicion dans lequel il s’était vainement débattu, à Fontenay, prît fin ; maintenant qu’il devait faire peau neuve, il eût voulu se forcer à posséder la foi, à se l’incruster dès qu’il la tiendrait, à se la visser par des crampons dans l’âme, à la mettre enfin à l’abri de toutes ces réflexions qui l’ébranlent et qui la déracinent ; mais plus il la souhaitait et moins la vacance de son esprit se comblait, plus la visitation du Christ tardait à venir. À mesure même que sa faim religieuse s’augmentait, à mesure qu’il appelait de toutes ses forces, comme une rançon pour l’avenir, comme un subside pour sa vie nouvelle, cette foi qui se laissait voir, mais dont la distance à franchir l’épouvantait, des idées se pressaient dans son esprit toujours en ignition, repoussant sa volonté mal assise, rejetant par des motifs de bon sens, par des preuves de mathématique, les mystères et les dogmes !

Il faudrait pouvoir s’empêcher de discuter avec soi-même, se dit-il douloureusement ; il faudrait pouvoir fermer les yeux, se laisser emporter par ce courant, oublier ces maudites découvertes qui ont détruit l’édifice religieux, du haut en bas, depuis deux siècles.

Et encore, soupira-t-il, ce ne sont ni les physiologistes ni les incrédules qui démolissent le catholicisme,