Page:Huysmans - A Rebours, Crès, 1922.djvu/73

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Macrin, sous l’étonnant grand-prêtre d’Émèse, Élagabal, et il préparait tranquillement ses sermons, ses écrits dogmatiques, ses plaidoyers, ses homélies, pendant que l’Empire romain branlait sur ses bases, que les folies de l’Asie, que les ordures du paganisme coulaient à pleins bords ; il recommandait, avec le plus beau sang-froid, l’abstinence charnelle, la frugalité des repas, la sobriété de la toilette, alors que, marchant dans de la poudre d’argent et du sable d’or, la tête ceinte d’une tiare, les vêtements brochés de pierreries, Élagabal travaillait, au milieu de ses eunuques, à des ouvrages de femmes, se faisait appeler Impératrice et changeait, toutes les nuits, d’Empereur, l’élisant de préférence parmi les barbiers, les gâte-sauce, et les cochers de cirque.

Cette antithèse le ravissait ; puis la langue latine, arrivée à sa maturité suprême sous Pétrone, allait commencer à se dissoudre ; la littérature chrétienne prenait place, apportant avec des idées neuves, des mots nouveaux, des constructions inemployées, des verbes inconnus, des adjectifs aux sens alambiqués, des mots abstraits, rares jusqu’alors dans la langue romaine, et dont Tertullien avait, l’un des premiers, adopté l’usage.

Seulement, cette déliquescence continuée après la mort de Tertullien, par son élève saint Cyprien, par Arnobe, par le pâteux Lactance, était sans attrait. C’était un faisandage incomplet et alenti ; c’étaient de gauches retours aux emphases cicéroniennes, n’ayant