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VIII




André descendit le matin dans la rue, les jambes molles, la tête vide et les yeux las. Il arpenta rapidement la rue de la Bruyère, s’éloignant, en toute hâte, sans savoir pourquoi, du logis de cette femme. Il ralentit son pas dès qu’il eut tourné au coin de la rue. Là, il s’aperçut dans la glace d’un magasin, pâle et les joues tirées. Il brossa son chapeau avec sa manche d’habit, refit son nœud de cravate et rougit à l’idée que tout le monde pouvait deviner, dans ses bottines d’écirées, dans son linge fripé, dans sa mine blême, l’éreintement d’une nuit blanche.

Les quartiers paresseux qu’il traversait, s’éveillaient à peine. Il ne rencontrait sur sa route que des sergents de ville, des porteurs de journaux et des laitières. Çà et là, des gens rentraient comme lui, exténués, les paupières battant du lilas dans des faces hâves. Ils se regardaient et passaient, ruminant d’identiques réflexions sans doute. Parfois, des gens plus dignes étalaient dans leur costume, dans leur habit noir et leur cravate blanche visibles sous le pardessus au collet relevé, l’excuse mondaine de leur épuisement.