Page:Huysmans - En menage - ed Fasquelle 1922.djvu/321

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

neuves, aux glaces levées, reflétant les couleurs environnantes, ou baissées, et laissant entrevoir des dedans capitonnés de soie nacarat, citron, bleu de dianelle !

J’ai souvent pensé à cela, vois-tu, depuis que je baguenaude sur ces trottoirs. Seulement, allez donc rendre, avec un crayon ou avec un pinceau, la note spéciale d’un quartier ! ce n’est pas l’affaire des peintres, c’est celle des hommes de lettres cela ! Il est vrai que vous êtes tous les mêmes dans votre partie, vous cherchez comme dans la nôtre midi à quatorze heures ; ainsi, toi qui habites ce quartier, de père en fils, tu t’empresses de mettre en scène dans tes livres ceux que tu ne connais pas ! car, enfin, il n’y a pas à dire, jamais toi et les autres, vous n’avez connu les rues que vous décriviez. Vous y allez deux fois, vous prenez des notes et vous vous imaginez que cela suffit ; comme si, pour dépeindre la vie d’un endroit, il ne fallait pas y avoir demeuré et roulé de toutes parts ! Oh oui, parbleu ! je sais bien, je prévois la réponse, vous avez des sommiers et des lits que vous ne pouvez déplacer, tous les huit jours. Eh bien ! un homme de lettres qui décrit Paris devrait vivre en garni, suivant les besoins de son œuvre, tantôt ici, et tantôt là. Et tant pis, après tout, on ne fait pas de l’art quand on veut ses aises !

André eut une moue.

— Oblige, pendant que tu y es, dit-il, les écrivains à voyager comme des saltimbanques dans une maringotte.