Page:Huysmans - En menage - ed Fasquelle 1922.djvu/323

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les maisons, du haut en bas ; des fenêtres garnies de linges séchant sur des cordes et soulevés par des têtes dépeignées de femmes qui vident à tour de bras, à chaque étage, de l’eau savonneuse dans les éviers. Sur les pavés, des tables munies à chaque coin de manches à balais supportant des plafonds de vieilles bâches rangées en deux bandes si rapprochées qu’un couple de personnes peut à peine passer le front dans l’étroit sentier, ensemble. Avec cela, un déballage étonnant de poissons et de viandes, de chevalières et de chaînes en doublé, à larges coulants, pour les maquignons et les souteneurs, des tas d’échaudés, des plumeaux et des lavettes, des résilles chenillées et des jarretières teintes de vermillon dur et de vert cru, des galoches, des alèses et des buscs, des faux cheveux et des cannes, c’est là, vaguement, le décor et les accessoires. Mets dans tout cela, maintenant, un fourmillement énorme de monde, deux files de femmes avançant, en sens inverse, refoulant tout ce qui vient à leur rencontre, des ribambelles de poitrines suivant, à la queue leu leu, des dos, des masses d’acheteuses, glissant avec leurs marmailles mal mouchées sur des épluchures, cognant du visage sur les chignons en marche devant elles, se grimpant sur les épaules les unes des autres, appelées par les marchands, tirées par ceux-ci, rattrapées par ceux-là, discutant et râlant comme des chipies sur des lapins écartelés et des volailles mortes, puis repartant, emportés par la foule, raccrochées encore par de nouveaux négociants