Page:Huysmans - En menage - ed Fasquelle 1922.djvu/352

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

ressentant cette joie que les gens casaniers éprouvent à retrouver leur chez-soi après de longues haltes dans les hôtels et dans les garnis ; lui, très perplexe, se reprochant d’être toujours le même sans défense devant une femme, n’augurant rien de bon de cette facilité avec laquelle Berthe s’était laissé vaincre, se répétant : je suis à sa merci, – puis se consolant par la perspective de quitter cette odieuse existence de garçon, regorgeant de crises juponnières et de carottes de bonnes, de se réinstaller dans un ménage sérieusement organisé, de vivre peut-être enfin tranquille.

— Veux-tu que nous préparions une tasse de thé ? fit-il, pour dire quelque chose.

Elle entendit le son de ses paroles sans en comprendre le sens. Elle s’éveilla de ses réflexions et regarda sa montre.

— Dix heures ! Mon oncle ne doit pas savoir ce que je suis devenue. Oh ! comme je suis faite ! murmura-t-elle, et, pendant qu’elle réparait, de son mieux, devant la glace, le désordre de sa coiffure et de sa robe, André tout en enfilant ses bottines pour la reconduire, parvint à se convaincre qu’il avait sagement agi. C’est peut-être la seule fois que je me sois conduit comme il le fallait avec ma femme. Oui, avoir plus de laisser-aller, moins de retenue et plus d’abandon, être enfant, gentil, bon garçon, comme je l’ai été avec Jeanne, voilà ! conclut-il en frappant le plancher de ses semelles pour faire mieux glisser la chaussette dans la bottine.