Page:Huysmans - En rade.djvu/193

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de caresses, car elle s’était attachée à ce chat qui les suivait, elle et son mari, comme un petit chien.

Elle parla de l’emmener à Paris pour le soustraire à l’humidité de cette campagne, et, de bonne foi, elle s’indigna contre Jacques qui déplorait que cet animal fût si exorbitamment laid.

Le fait est que ce chat, maigre ainsi qu’un cent de clous, portait la tête allongée en forme de gueule de brochet et, pour comble de disgrâce, avait les lèvres noires ; il était de robe gris cendré, ondée de rouille, une robe canaille, aux poils ternes et secs. Sa queue épilée ressemblait à une ficelle munie au bout d’une petite houppe et la peau de son ventre, qui s’était sans doute décollée dans une chute, pendait telle qu’un fanon dont les poils terreux balayaient les routes.

N’étaient ses grands yeux câlins, dans l’eau verte desquels tournoyaient sans cesse des graviers d’or, il eût été, sous son pauvre et flottant pelage, un bas fils de la race des gouttières, un chat inavouable.

C’est à crever ici, se dit Jacques, lorsque cette bête refusa de jouer. Et ce qu’on est mal ! pas même un fauteuil pour s’asseoir ! impossible, comme aux bains de mer, de fumer du tabac qui ne soit pas mouillé — et ne pas même avoir envie de lire !