Page:Huysmans - En route, Stock, 1896.djvu/135

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que vous ne pouvez vaincre ; sans même qu’ils connaissent votre nom, du fond de leur province, des monastères de Carmélites et de Clarisses vont, sur une lettre de moi, prier pour vous.

Et le fait est qu’à partir de ce jour-là, les attaques les plus lancinantes cessèrent. Cette accalmie, cette trêve, la dut-il à l’intercession des ordres cloîtrés ou au changement de temps qui se produisit, à la défaillance du soleil qui se submergea sous des flots de pluie ; il ne le sut ; une seule chose était certaine, c’est que les tentations s’espacèrent et qu’il put impunément les subir.

Cette idée de couvents le tirant par compassion de la bourbe où il s’enlisait, le ramenant par charité sur une berge, l’exalta. Il voulut aller, avenue de Saxe, prier chez les sœurs de celles qui souffraient pour lui.

Plus de lumières, plus de foules, comme ce matin où il avait assisté à une prise de voile ; plus d’odeur de cire et d’encens, plus de défilé de robe pourpre et de chape d’or ; c’était le désert et la nuit.

Il se tenait là, seul, dans cette chapelle sombre et humide, sentant l’eau qui dort ; et, sans dévider le tournebroche des chapelets ou répéter les oraisons apprises, il rêvassait, cherchant à voir un peu clair dans sa vie, à se rendre compte. Et tandis qu’il se colligeait, des voix lointaines arrivaient derrière la grille et elles s’approchaient peu à peu, passaient par le noir tamis du voile, tombaient brisées autour de l’autel dont la masse confuse se dressait dans l’ombre.

Ces voix des Carmélites aidaient Durtal à s’effondrer dans le désespoir.

Assis sur une chaise il se disait : Lorsqu’on est ainsi