Page:Huysmans - En route, Stock, 1896.djvu/137

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

trop ignoble, car elle seule peut, en les épurant, exhausser les âmes ! Mais tout ça, ce n’est rien moins que consolant, reprit-il. — Et quel accompagnement pour ses tristes songeries que les voix en deuil de ces nonnes ! ah ! c’est vraiment affreux.

Et il finissait par fuir, par échouer, pour dissiper son navrement, dans le monastère voisin situé au fond de l’impasse de Saxe, dans une allée de banlieue, pleine de réduits qui précèdent des jardins où des serpents en cailloux de rivière se déroulent autour de pastilles d’herbes.

C’était là que résidaient les pauvres Clarisses humiliées de l’Ave Maria, un ordre encore plus rigide que celui des Carmélites, mais plus indigent, moins comme il faut, plus humble.

On pénétrait dans ce cloître par une petite porte poussée contre ; l’on montait, sans rencontrer personne, jusqu’au deuxième étage et l’on découvrait une chapelle dont les fenêtres laissaient voir des arbres qui se balançaient dans des pépiements de moineaux fous.

C’était encore une sépulture ; mais ce n’était plus, comme en face, la tombe, au fond d’un caveau noir ; c’était plutôt un cimetière avec des nids chantant, au soleil, dans des branches ; l’on se serait cru, à plus de vingt lieues de Paris, à la campagne.

Le décor de cette claire chapelle essayait pourtant d’être sombre ; il ressemblait à celui de ces boutiques de marchands de vins dont les cloisons simulent des murs de caves, avec de chimériques pierres peintes dans les raies imitées d’un faux ciment. Seulement, la hauteur de la nef sauvait l’enfantillage de cette imposture, relevait la vulgarité de ce trompe-l’œil.