Page:Huysmans - En route, Stock, 1896.djvu/156

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communions, pratiquer la minution ou la saignée, lui faire ingérer des aliments auxquels sont mêlées des semences froides ; mais elle doit surtout prier, ainsi que toute la communauté, pour elle.

Une vieille abbesse de Bénédictines, que j’ai connue à Saint-Omer et qui était une incomparable régisseuse d’âmes, limitait surtout alors la durée des confessions. Aux moindres symptômes qu’elle voyait poindre, elle accordait deux minutes, montre en main, à la pénitente ; et quand ce temps était écoulé, elle la renvoyait du confessionnal et la mêlait à ses compagnes.

— Et pourquoi cela ?

— Parce que, dans les cloîtres, même pour les âmes bien portantes, la confession est l’amollissement le plus dangereux ; c’est, en quelque sorte, un bain trop prolongé et trop chaud. Là, les moniales débordent, se déploient inutilement le cœur, s’appesantissent sur leurs maux, les exaspèrent en s’y complaisant ; elles en sortent plus débilitées, plus malades qu’auparavant. Deux minutes doivent, en effet, suffire à une religieuse pour énoncer ses peccadilles !

Puis… puis… il faut bien l’avouer, le confesseur est un péril pour le monastère — non que je suspecte son honnêteté, ce n’est point cela que je veux dire — mais comme il est généralement choisi parmi les protégés de l’évêque, il existe de nombreuses chances pour qu’il soit un homme qui ne sache rien et qui, ignorant absolument le maniement de telles âmes, achève de les détraquer, en les consolant. Ajoutez encore que si les attaques démoniaques, très fréquentes dans les cloîtres, se produisent, le malheureux reste bouche béante, con-