Page:Huysmans - L'Oblat.djvu/178

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

paysan est donc privilégié dans ce village ; eh bien, il est si bête, si hostile aux religieux qu’il sera enchanté de leur voir enlever la cure ; pourquoi ? Il ne s’en doute même pas, ce ne sera que plus tard, alors qu’il s’apercevra que ce changement atteint sa bourse, qu’il comprendra la bêtise de sa joie.

Quant aux hobereaux, c’est pour eux un triomphe. Ils auront enfin un curé à eux, mais j’aime à croire que tant que nous serons là, l’on interdira au baron des atours et à sa famille de chanter de la musique profane dans notre église…

— C’est à savoir ! s’exclama Durtal ; — allons, une goutte de chartreuse, mademoiselle ma sœur, comment, vous refusez ?

— Vous êtes féroce ; je pleure, en buvant mon petit verre, tant c’est fort ; et elle accompagna cette plainte d’un sourire angélique, tout en achevant de laper la dernière larme.

— Nous traversons pour l’instant une période d’ennuis, reprit le père Felletin qui restait songeur.

— Qu’y a-t-il encore ?

— Il y a, il y a, que j’ai bien peur d’être obligé de renvoyer le plus intelligent de mes novices, le frère Sourche !

— Pourquoi ?

— À cause de ses idées, hélas ! — ce garçon est compréhensif et érudit, et, il est aussi obéissant et pieux ; il a toutes les qualités, mais il rayonne autour de lui l’agitation ; il m’effraie, à certains moments, alors que je le vois courir, soufflant comme une machine, dans les corridors ; c’est une nature exubérante et capable d’éclater