Page:Huysmans - L'Oblat.djvu/202

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employer — car ce n’était plus absolument de la psalmodie et ce n’était pas tout à fait du chant. La phrase se dépliait sur une sorte de mélodie grave et languide, lente et plaintive et, en fermant les yeux, en écoutant ces airs qui en étaient à peine, c’était un dodelinement de l’âme, étrange, un serré de cœur très doux, un bercement finissant tout à coup, comme par une larme, sur une note triste.

Ah ! il avait raison, Dom Felletin ! quel superbe office et quelle radieuse nuit ! Alors que le vieux monde pèche ou dort, le messie naît et des bergers, éblouis, l’adorent ; et, au même moment, ces personnages mystérieux, ces êtres de rêve, annoncés bien avant saint Matthieu par Isaïe et par le psalmiste qui les qualifie de rois de Tharsis, d’Arabie et de Saba, galopent, surgissant d’on ne sait où, sur des dromadaires, à la suite d’une étoile, dans la nuit, pour adorer à leur tour l’enfant et disparaître dans un chemin autre que celui par lequel ils sont venus.

En a-t-elle suscité des controverses cette étoile ! Mais ce que toutes les hypothèses des astronomes me semblent, avec leurs inévitables bévues, inhabiles et ce que je leur préfère l’idée du Moyen-Age, extraite du livre apocryphe de Seth et reprise par saint épiphane et l’auteur du commentaire imparfait de saint Matthieu. Eux, pensaient que l’astre de Bethléem était apparu aux mages avec la figure d’un enfant assis, sous une croix, dans une sphère rayonnante de feux ; et les primitifs représentèrent, en effet, pour la plupart, cette constellation sous cette forme, Roger Van der Weyden, dans un des volets de sa merveilleuse nativité du musée de Berlin, pour en citer, au hasard, un.