Page:Huysmans - L'Oblat.djvu/88

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— Je vous crois, répliqua Durtal, en riant.

— Enfin, va, puisque vous y tenez pour le jardin de votre Strabo ; mais dans la nomenclature de ses herbes et de ses fleurs, il y en a qui n’ont jamais dû être exploitées par la médecine : le radis, le cornichon, le cerfeuil, par exemple ; ce ne sont pas des matières de pharmacie, mais des articles de cuisine.

— Si fait, Madame Bavoil ; les apothicaires du Moyen-Age les utilisaient dans certains cas ; le melon, les cornichons, les concombres, toute la famille des cucurbitacées possédaient, selon eux, des propriétés qui ne sont peut-être pas entièrement inexactes. Ils croyaient qu’un emplâtre de chair de melon guérissait l’inflammation des yeux ; que le jeune cornichon était apte à apaiser les vomissements causés par la chaleur du ventricule ; que leurs feuilles appliquées avec du vin, en liniment, mâtaient les accès de la rage. Quant aux vertus du radis, elles sont douteuses ; par contre, le cerfeuil est noté tel qu’un diurétique et un résolutif dont on usait pour résoudre l’engorgement laiteux des seins ; le melon était, en tout cas, en dehors de ses autres qualités, déjà reconnu comme un laxatif — et sa réputation n’a pas varié…

Et puis, si vous saviez combien ça m’est égal que les favorites de Strabo aient des propriétés médicinales ou n’en aient pas ; mon point de vue est autre ; ce parterre plus ou moins attrayant par ses couleurs et par ses formes, n’est pour moi qu’un tremplin de saut en arrière, qu’un véhicule reculé de songes. Je suis parfaitement homme à m’imaginer, en le regardant, le bon Abbé Bénédictin Walhafrid, taillant et arrosant ses élèves, faisant