Page:Huysmans - L'Oblat.djvu/99

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larges pans dont ils s’enveloppent les mains lorsqu’ils arborent ces insignes. Pour la crosse, cela ne présente rien de bien particulier, mais pour la mitre, c’est autre chose. Il faut qu’elle soit repliée et tenue, de la façon dont saint Denys tenait sa tête ; ce n’est rien si vous voulez, mais si cette pose est mal observée, le caractère Moyen-Age disparaît ; eh bien, Dom d’Auberoche a non seulement appris au porte-mitre le geste, mais il a personnellement surveillé les plis de l’écharpe, la planant ou la cassant aussi bien qu’un statuaire du treizième siècle ; il rendrait des points aux costumiers de Paris ; il n’a pas dans la congrégation son pareil !

— Il est encore tout jeune, remarqua Mme Bavoil.

— Il doit avoir trente-quatre ans à peine. Il est né d’une grande famille apparentée à des saints ; il a ce qu’on nomme, en art, la ligne, et il semble toujours descendre de sa verrière. Outre qu’il est un religieux très macéré, il est un érudit très intéressant à écouter lorsqu’il traite de la liturgie et de la symbolique ; mais on le voit peu ; d’abord, il est très occupé avec ses études et ses répétitions de cérémonies, puis il est ce qu’on appelle un « solitaire », autrement dit un moine vivant à l’écart, dans sa cellule.

— Ah ! si, dans cette abbaye, le chant était à la hauteur du cérémonial, je n’aurais pas à regretter Solesmes, soupira Mlle de Garambois.

— Oui, mais le père Ramondoux est un chanteur de cour ; il me paraît toujours, lorsqu’il va ouvrir la bouche, qu’il en sortira ce cri de la rue : tonneaux, tonneaux ! Le plus curieux c’est qu’il n’est nullement ignare en son métier ; il enseigne très bien le plain-chant à ses élèves,