Page:Huysmans - Là-Bas, Tresse & Stock, 1895.djvu/298

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Maintenant qu’y a-t-il de vrai dans cette prétendue puissance dont les chimistes déicides disposent ? quelle foi ajouter à ces évocations de larves tuant, sur un ordre, une personne désignée, avec des huiles corrosives et des sangs vireux ? Tout cela semble bien improbable, voire même un peu fol !

Et pourtant ! quand on y réfléchit, ne retrouve-t-on pas, aujourd’hui inexpliqués et se survivant sous d’autres noms, les mystères que l’on attribua si longtemps à la crédulité du Moyen Âge ? À l’hôpital de la Charité, le Dr  Luys transfère d’une femme hypnotisée à une autre des maladies. En quoi cela est-il moins surprenant que les artifices de la goétie, que les sorts jetés par des magiciens ou des bergers ? Une larve, un esprit volant, n’est pas, en somme, plus extraordinaire qu’un microbe venu de loin et qui vous empoisonne, sans qu’on s’en doute ; l’atmosphère peut, tout aussi bien charrier des Esprits que des bacilles. Il est bien certain qu’elle véhicule sans les altérer, des émanations, des effluences, l’électricité par exemple, ou les fluides d’un magnétiseur qui envoie à un sujet éloigné, l’ordre de traverser tout Paris pour le rejoindre. La science n’en est même plus à contester ces phénomènes. D’un autre côté, le Dr  Brown-Séquard rajeunit des vieillards infirmes, ranime des impuissants avec des injections de