Page:Huysmans - La Cathédrale, 1915.djvu/193

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— Mais enfin, demanda Mme Bavoil, comment se fait-il que cette couleur, qui est toute innocence, toute pureté, qui est la couleur même de notre Mère, ait disparu du nombre des tons liturgiques ?

— Le bleu a été employé, au Moyen Age, pour les offices de la Vierge et ce n’est qu’à partir du XVIIIe siècle, qu’on le délaissa, fit l’abbé Plomb — dans l’Eglise Latine, sauf en Espagne ; mais les Eglises orthodoxes de l’Orient s’en accoutrent encore.

— Pourquoi chez nous cet abandon ?

— Je l’ignore, comme j’ignore pourquoi tant de tons, autrefois usités dans nos liturgies, s’effacèrent. Où sont les teintes de l’ancien Missel de Paris : le jaune safran réservé à la fête des Anges, l’aurore que l’on substituait, dans quelques cas, au rouge, le cendré qui compensait le violet, le bistre qui suppléait le noir, à certains jours ?

Puis, il y avait encore une couleur charmante qui continue d’ailleurs à figurer dans la gamme du rit Romain, mais que presque partout les Eglises omettent, la teinte dite « de rose sèche », tenant le milieu entre le violet et le pourpre, entre la tristesse et la joie, une sorte de compromis, de nuance diminutive, dont l’Eglise se servait le troisième dimanche de l’Avent et le quatrième de Carême. Elle révélait ainsi, dans un temps de pénitence qui finissait, un commencement d’allégresse, car les fêtes de Noël et de Pâques étaient proches.

C’était-là une idée d’aube spirituelle se levant dans la nuit de l’âme, une impression spéciale que le violet arboré maintenant, ces jours-là, ne saurait rendre.

— Oui le bleu et le rose disparus des chapelles de l’Occident sont regrettables, fit l’abbé Gévresin ; mais,