Page:Huysmans - La Cathédrale, 1915.djvu/26

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en face d’une bougie, que l’âme éclatait de même qu’une cosse, projetant les semences de ses péchés, les graines de ses fautes ; et le repentir si lent à se décider, si douteux parfois devenait si despotique, si certain, qu’étouffé par les larmes on tombait à genoux, devant le lit, et que l’on s’enfouissait, en sanglotant, la tête dans les draps.

Et c’étaient des soirées mortellement tristes et pourtant si douces ! l’on se ravageait, l’on se décortiquait les fibres de l’âme, mais ne sentait-on pas la Vierge, à ses côtés, si pitoyable, si maternelle, qu’après la crise, Elle prenait cette âme toute en sang, dans ses bras et la berçait, ainsi qu’une enfant malade, pour l’endormir.

Puis, pendant le jour, l’église était un refuge contre cette folie du vertige qui s’abattait sur vous ; l’œil égaré par tous ces précipices qu’il rencontrait, affolé par la vue de ces nuages qui se formaient soudain au-dessous de lui et fumaient en de blancs flocons sur le flanc des rocs, se rassérénait, à l’abri, entre ces murs.

Enfin, pour compenser l’horreur du paysage et des statues, pour atténuer même le comique des serviteurs de l’hôtel qui avaient des barbes de sapeurs et des vêtements d’enfants, les képis, les blouses grises à ceinturons, les culottes en tôle noire des élèves de l’institution Saint-Nicolas, à Paris, des âmes extraordinaires, des âmes divinement simples s’éployaient là.

Et Durtal se remémorait l’admirable spectacle auquel il avait assisté, un matin.

Il était assis sur le plateau, à l’ombre glacée de l’église, regardant le cimetière devant lui et la houle immobile des monts. Tout au loin, dans le ciel, des grains coulaient,