Page:Huysmans - La Cathédrale, 1915.djvu/346

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

étaient vaines. D’abord la santé ? mais il ne se rappelait donc plus la Trappe où l’alimentation était autrement débilitante, où le régime était autrement rigoureux ! pourquoi dès lors s’alarmer d’avance ?

D’autre part, il ne comprenait donc pas la nécessité des entretiens, la sagesse des devis, rompant la solitude de la cellule juste au moment où l’ennui s’impose ? c’était un dérivatif aux rabâchages intimes et les promenades en commun assuraient l’hygiène de l’âme et tonifiaient le corps ; puis à supposer que les colloques monastiques fussent puérils, est-ce que les racontars entendus dans un autre monde étaient plus nutritifs ? enfin, la fréquentation des moines n’était-elle pas très supérieure à celle des gens de tout état, de toute condition, de tout poil, qu’il faut, dans la vie externe, subir ?

Qu’est-ce, au surplus, que ces bagatelles, que ces petits détails dans l’ensemble magnifique du cloître ? que pesaient ces menuailles, ces riens, en comparaison de la paix, de l’allégresse de l’âme exultant dans la joie des offices, dans le devoir accompli des louanges ? est-ce que le flot des liturgies ne lavait pas tout, n’emportait pas, tels que des fétus, les minimes défauts des êtres ? n’était-ce point aussi l’histoire de la paille et de la poutre, les rôles renversés, les imperfections aperçues chez autrui, lors que soi-même on lui est si inférieur ?

Toujours, au bout de mes raisonnements, je découvre mon manque d’humilité, se disait-il. Il réfléchissait. — Que d’efforts, reprit-il, pour s’enlever la crasse de ses vices ! peut-être que, dans un couvent, je me dérouillerais ; et il rêvait d’une existence épurée, une âme imbibée