Page:Huysmans - La Cathédrale, 1915.djvu/378

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Renaissance, élégantes et jolies, visiblement échappées des œuvres des Préraphaélites, se recommandant surtout de Walter Crane.

L’idéal de Beuron était alors devenu un alliage de l’art français du premier Empire et de l’art anglais moderne

D’aucunes de ces planches frisaient le ridicule, celle de la IXe station, pour en citer une ; le Christ couché de son long, sur le ventre, était relevé par les mains jointes, soutenu par une corde ; il avait l’air d’apprendre à nager ; mais pour des parties banales et faibles, pour des détails gauches et prévus, quels morceaux curieux se détachaient soudain de cet ensemble ! — La Véronique à genoux devant Jésus était vraiment pâmée de douleur et d’amour, vraiment belle ; les copies, les décalques des autres personnages disparaissaient et, même dans les pages les moins originales, le dessin pataud et déplaisant de ces moines, se mettait à parler une langue presque éloquente ; c’est qu’il sortait de cette œuvre une foi et une ferveur intenses. Un souffle passait sur ces visages et les vivifiait ; une émotion, un accent de prière animaient le silence de ces poncifs ; ce Chemin de Croix était, à ce point de vue, sans égal ; la piété monastique apportait un élément inattendu, affirmait la mystérieuse puissance dont elle dispose, en imprégnant, d’une saveur personnelle, d’une senteur particulière, une œuvre qui n’eût même pas existé sans elle. Plus que des artistes d’une autre envergure, ces Bénédictins suggéraient la sensation de l’à-genoux, évoquaient le parfum des Evangiles.

Seulement leur tentative était restée sans issue et, à