Page:Huysmans - La Cathédrale, 1915.djvu/390

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eux ; en d’énormes lancettes surmontées de roues, ils se rangaient, debout, le long de l’étage supérieur, montraient à Jésus, cloué sur le sol, son armée restée fidèle, ses troupes dénombrées par les Ecritures, par les Légendaires, par le Martyrologe ; et Durtal reconnaissait dans la foule gladiée des vitres, Saint Laurent, Saint Etienne, Saint Gilles, Saint Nicolas de Myre, Saint Martin, Saint Georges, Saint Symphorien, Saint Philippe, Sainte Foix, Saint Laumer, combien d’autres, dont il ne se souvenait plus des noms ! faisait halte, émerveillé, près du transept devant un Abraham levant en un éternel geste de menace, au-dessus d’un Isaac à jamais courbé, la lame claire d’un glaive, dans l’azur infini d’un ciel.

Et il admirait la conception et la facture de ces verriers du XIIIe siècle, leur langage excessif, nécessité par les hauteurs, la lecture qu’ils avaient rendue facile à distance de leurs tableaux, en n’y introduisant, autant que possible, qu’une seule figure, en la peignant à traits massifs, à couleurs tranchées, de façon à pouvoir être comprise, vue d’en bas, d’un coup d’œil.

Mais la fête suprême de cet art n’était ni dans le chœur, ni dans les bras de l’Eglise, ni dans la nef ; elle était à l’entrée même de la Basilique, au revers du mur qui contenait sur son endroit, au dehors, les statues anonymes des Reines. Durtal se passionnait pour ce spectacle, mais il le retardait quand même un peu, afin de se mieux exciter par l’attente et de savourer ce sursaut de joie qu’il éprouvait, sans que la fréquence de ces sensations fût encore parvenue à les détruire.

Ce jour-là, par un temps de soleil, elles resplendissaient, les trois fenêtres du XIIe siècle, avec leurs lames