Page:Huysmans - La Cathédrale, 1915.djvu/391

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d’épées courtes, leurs lames de braquemarts, à champ large et plat, tirées sous la rose qui domine le portail d’honneur.

C’était un pétillement de bluettes et d’étincelles, un tricot remué de feux bleus, d’un bleu plus clair que celui dans lequel Abraham brandissait son glaive ; cet azur pâle, limpide rappelait les flammes des punchs, les poudres en ignition des soufres et aussi ces éclairs que dardent les saphirs, mais alors des saphirs tout jeunes, encore ingénus et tremblants, si l’on peut dire ; et, — dans l’ogive de verre, à droite, l’on distinguait, délinéées par des lignes de braises, la tige de Jessé, et ses personnages montant en espalier, dans l’incendie bleu des nues ; — dans celle du milieu et celle de gauche, l’on discernait les scènes de la vie de Jésus, l’Annnonciation, les Rameaux, la Transfiguration, la Cène, le repas avec les disciples d’Emmaüs, tandis qu’au-dessus de ces trois croisées, le Christ fulgurait au cœur de la grande rose, que les morts sortaient, au son des trompettes, de leurs tombes, que saint Michel peait les âmes !

Ce bleu du XIIe siècle, ruminait Durtal, comment les verriers de ce temps l’ont-ils acquis et comment, depuis si longtemps, les vitriers l’ont-ils, ainsi que le rouge, perdu ? — Au XIIe siècle, les peintres du verre employaient surtout trois couleurs : d’abord, le bleu, ce bleu ineffable de ciel irrésolu qui magnifie les carreaux de Chartres ; puis le rouge, un rouge de pourpre sourde et puissante ; enfin le vert, inférieur, en tant que qualité, aux deux autres tons. en guise de blanc, ils se servaient de la nuance verdâtre. Au siècle suivant, la palette s’élargit, mais se fonce ; les verres sont plus épais ; pourtant, quel azur