Page:Huysmans - Les Sœurs Vatard, Charpentier, 1880.djvu/270

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il s’arrêtait court, son cœur battait la chamade, il était subitement convaincu qu’elle lui ferait encore faux bond.

Il reprenait sa marche, la tête basse. — La grande blonde le rencontrait pendant son quart, et, regardant sa figure chagrine, lui disait : eh bien ! Les amours, ça ne va donc pas ? — Il étranglait, éprouvait le besoin de crier à n’importe qui ses anxiétés, ses espoirs, de se faire assurer que Désirée viendrait. La femme l’écoutait mais ne répondait rien. — Il la pressa. — Si vous étiez à sa place, n’est-ce pas que vous seriez venue ? Elle murmurait : Je ne sais pas ! — Elle semblait ne pas vouloir lui dire comment elle aurait agi. — Il comprenait et il la poussait à parler avec instances. Elle finit par murmurer : si vous ne l’aviez pas suivie hier, elle serait déjà arrivée, maintenant dame ! je ne sais pas ; elle est sûre que vous tenez à elle, tout ça, ça dépend des caractères, vous comprenez, moi, je ne peux pas vous dire !

Tout à coup Désirée parut. — Elle avait fait halte sur le trottoir en face et considérait, très étonnée, Auguste causant avec cette femme. Elle traversa la chaussée et se plaça derrière eux. La fille la dévisagea effrontément, puis, sans prononcer un mot, elle pivota sur ses talons et s’en fut faire sonner plus loin la cloche ballonnante de son jupon blanc.