Page:Huysmans - Les Sœurs Vatard, Charpentier, 1880.djvu/274

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avoir traîné pendant quelque temps cette vie, après avoir bu dans le verre de tout le monde pendant des mois, il en avait eu assez ! il avait eu des élans, des postulations vers des femmes autres, il avait aspiré après une amie qui fût gentille et bonne, il avait rêvé d’une chambre bien close, d’une ménagère dont toutes les pensées convergeraient sur lui ! — À quoi, toutes ces appétences, toutes ces ardeurs l’avaient-elles mené ? aux ennuis sans nombre d’une liaison chaste, aux avanies, aux douleurs d’une passion exaltée par les obstacles, refoulée, affaiblie et comme usée par un heurt quotidien, par un frottement continu des caractères. — Il se retrouvait aujourd’hui plus seul, plus abattu, plus désorienté que jamais ! Il allait maintenant à la dérive, le voyait, n’avait même plus le courage de se rattraper aux branches. Une seule idée surnageait dans cette débâcle, une idée obsédante et fixe : le mariage. Il voulait, à tout prix, trouver une délivrance, un havre, où il pourrait s’échouer ; il songeait après ces bourrasques à un long repos ; et ces pensées le hantaient, surtout depuis qu’il était allé voir un ami qui s’était marié. Il était bien heureux celui-là ! il n’avait eu aucun ennui avec sa future ! Ils s’étaient épousés, simplement parce qu’ils se plaisaient. Le mari ne gagnait pas plus de cinq francs par jour et la femme n’en