Page:Huysmans - Les Sœurs Vatard, Charpentier, 1880.djvu/308

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se haussa un peu sur son banc et chercha Anatole. Elle l’aperçut ; ils s’envoyèrent un bonjour et se désignèrent, par un clin d’yeux, la porte. Cyprien n’avait rien vu à cet échange de regards. Il contemplait la salle tandis qu’un turlupin émiettait, dans une sauce rebattue de musique, du patriotisme et de l’amour. Il jugea odieuse cette moitié de cirque avec ses lourds guillochis d’or, ses deux galeries superposées ; l’une teinte en cachou, vernissée et roussie par le feu des gaz, étayée par des colonnes de fonte, drapées jusqu’à mi-corps de velours rouge ; l’autre plus élevée, divisée en des sortes de cages, munies, comme pour enfermer les bêtes, de barreaux peinturlurés de cet horrible vert-bronze, réservé d’ordinaire aux poêles. Le plafond avec ses losanges, ses ramages, ses palmettes qui le faisaient ressembler à ces cachemires de camelotte qu’on fabrique en France, lui donna des nausées.

Il fit d’autant moins attention à Céline qui persistait à jouer de la prunelle, qu’il tentait en vain de se consoler du déboire de couleurs qu’il éprouvait en considérant la scène. Elle ne lui parut ni moins attristante, ni moins minable que le reste. Suffisamment profonde et large, elle était garnie, de chaque côté, de panneaux de fleurs et d’attributs en relief, durement rendus, écrasés encore par d’ignobles masques qui gri-