Page:Huysmans - Les Sœurs Vatard, Charpentier, 1880.djvu/318

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une salière, un moutardier et une grande soupière.

— C’est de la porcelaine ! s’exclama la grosse Eugénie.

— Tiens, croyez-vous donc, s’exclama la contre-maître, que, lorsque je veux faire plaisir aux gens, je n’achète pas tout ce qu’il y a de plus beau ?

Le service passa de mains en mains. Parmi les brocheuses, les unes regardaient le jour au travers des assiettes, les autres tapaient dessus avec leurs doigts et écoutaient soigneusement si elles ne rendaient point des sons fêlés ; toutes marquèrent sur l’émail luisant l’empreinte noire de leurs pouces. La soupière qui circulait pensa s’abattre. La contre-maître interrompit aussitôt la chaîne qui se déroulait d’un bout de l’atelier à l’autre, réempila dans son panier ces pâtes mirifiques de Montereau et de Creil, et, avec mille précautions, elle déposa le tout à sa place, auprès de sa chaise.

— C’est Désirée qui va être contente ! dit Céline. En voilà un beau cadeau de noce qu’on lui donne, madame !

— Elle se marie ! eh bien quoi ! jeta l’ouvrière qui souffrait des dents, en v’là-t-il pas ? Ma parole, on s’imaginerait que c’est quelque chose d’étonnant ! En v’là des affaires pour rien ! La maison ne nous donnerait seulement pas un radis à nous, si