Page:Huysmans - Sainte Lydwine de Schiedam (1912).djvu/106

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elles dispensent à ce merveilleux Indigent une aumône de larmes ; elles le rétablissent dans la joie qu’il s’est interdite des holocaustes.

Ajoutez, Lydwine, que si ces âmes, qui admettent comme leur Créateur d’être châtiées pour des crimes dont elles sont indemnes, n’existaient pas, il en serait de l’univers de même que de notre pays, sans l’abri des digues. Il serait englouti par la crue des péchés, ainsi que la Hollande par le flux des vagues.

Elles sont donc à la fois et les bienfaitrices du Ciel et les bienfaitrices de la terre, ces âmes !

Mais alors, ma fille, quand une âme en est à ce point, sa façon de souffrir change. Dieu rapproche, en quelque sorte, les deux sensations extrêmes de la béatitude et de la douleur et elles s’amalgament. Où est l’une et qu’est-il resté de l’autre ? nul ne le sait ; c’est l’incompréhensible fusion d’un excès et d’une défaillance ; et l’âme éclaterait sous cette pression, si le martyre du corps n’intervenait pour lui permettre de reprendre haleine, afin de se mieux réjouir ; en somme, c’est par les marches de la souffrance que l’on fait l’ascension des joies !

À l’heure actuelle, vos aîtres spirituels sont à vif ; mais comprenez-le, vous souffrez parce que vous ne voulez pas souffrir ; le secret de votre détresse est là. Accueillez-la et offrez-la à Dieu cette douleur qui vous désespère et il l’allégera ! Il la compensera par de telles consolations que le moment viendra où vous vous écrierez : mais je le leurre ! il a contracté avec moi un marché de dupe ; je me suis offerte pour