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PEER GYNT

C’est vrai, mes tours de sacripan
L’ont bien souvent mise en colère.
Elle poussait des cris de paon.
« Vieil oiseau », disais-je à ma mère,
J’avais tort et veux, bon apôtre,
Qu’on l’honore et respecte ici.
Elle vaut bien autant qu’une autre ;
Les bons, chez nous, sont faits ainsi.
Eh ! voici venir Dieu le Père.
Il va te donner ton écot.

(Faisant la grosse voix.)

Tu parles en portier, saint Pierre.
Laisse entrer Aase, et plus un mot ! »

(Il rit tout haut et se tourne vers sa mère.)

Tu le vois bien ! C’est tout de suite une autre chanson. (D’une voix anxieuse.) Qu’as-tu donc à regarder ainsi, comme si ta prunelle allait éclater. Mère ! ne m’entends-tu pas ? (Il s’approche du chevet.) Il ne faut pas me fixer comme ça ! Parle donc, mère ! C’est moi, ton garçon ! (Il touche avec précaution le front et les mains d’Aase.) Ah ! voilà donc ce que c’est ! Allons, Bruneau, tu peux te reposer maintenant. Nous sommes arrivés. (Il ferme les yeux de la morte et se penche sur elle.) Merci pour tout ce que tu as fait, pour les coups et pour les caresses ! Et maintenant remercie-moi à ton tour (il presse son front contre les lèvres de sa mère) de t’avoir conduite jusqu’au but.