Page:Ivoi - Jud Allan, roi des gamins.djvu/203

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— Vous savez, petite chose, il a la main lourde, Foorberg… Aussitôt que vous en aurez assez, appelez-moi… ; et les couteaux dussent-ils prendre l’air, je vous ferai lâcher.

— Bon, murmura Jud, je vous remercie, Jetty… Mais vous oubliez ce que je vous ai dit à Alb-Point ; la force n’est rien, l’adresse est tout.

— C’était donc sérieusement que vous me proposiez de me tomber ?

Jud affirma du geste.

— Seulement, vous êtes un bon vieux garçon, Jetty. Vous m’avez tiré de prison, vous m’avez fait embaucher par le Crâne… Cela m’aurait ennuyé de me battre avec vous !… Tandis que l’autre, ça m’amusera, et je vous prouverai tout de même que je vous disais la vérité.

Sur ce, le gamin escalada les marches de l’escalier accédant au pont. Jetty secoua la tête, murmura d’un air peu convaincu :

— Satané petit bonhomme, il va se faire mettre en bouillie.

Et à son tour, il gravit l’escalier, enjambant quatre marches à la fois.

Déjà, sur le pont, Jud et von Foorberg sont au centre d’un cercle de curieux. Les bandits, des matelots se sont groupés.

Ils rient, ils plaisantent, ne pouvant prendre au sérieux le défi de l’enfant au gigantesque von Foorberg.

Il faut être aveuglé par la colère comme l’Allemand, pour ne pas sentir le ridicule de la situation.

Jud excite son adversaire par d’incessants quolibets. Brusquement, le petit bondit en avant, applique une claque sur l’abdomen de Foorberg, et clame d’une voix de fausset :

— Premier engagement. Le gros gentleman est touché !

Un éclat de rire homérique accueille le geste, le mot. Foorberg y répond par un hurlement de rage. Ce coquin se moque trop de lui ! Il va le corriger une fois pour toutes ! Il s’élance sur son chétif adversaire.

Une anxiété étreint les assistants… Ce sont des bandits, ou des matelots s’adonnant à la contrebande à l’occasion. Et cependant tous sont choqués par la disproportion des forces des deux combattants.

Mais l’anxiété fait place à une véritable stupeur.