Page:Ivoi - Le Serment de Daalia.djvu/140

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— Le cresson ? répéta Morlaix quelque peu interloqué.

Lisbeth baissa les yeux :

— Oui, expliqua-t-elle pudiquement, le cresson, satisfaction, bien-être, santé du corps et de l’esprit.

— Ah ! mademoiselle, l’air marin est, en effet, excellent.

— Je ne parle pas de lui.

— Non…

— Mais de vous…

Et rougissante, ce qui vraiment ne lui allait pas mal, en dépit de la casquette bleue, de la vareuse saumon et du jupon violet, dont elle avait trouvé bon de s’affubler à bord.

— De votre conversation, poursuivit-elle vivement. J’ai appris beaucoup de choses en vous écoutant, beaucoup. Si, si — elle insista du geste en réponse à un mouvement dubitatif de son interlocuteur.

— Si, si. Tenez, vous m’avez enseigné que…

Elle s’arrêta, parut hésiter, puis prenant son parti :

— Que l’axiome des hommes qui brassent les affaires, cet axiome que je croyais vrai et juste, est, comment dirai-je, peu digne d’un esprit noble… Les affaires, c’est l’argent des autres ! Eh bien, j’ai compris que, selon votre expression, cela est immoral et indélicat.

— Je n’ai pas eu grand mal à vous persuader.

— Parce que vous exprimiez des pensées justes. C’est même très heureux que M. Niclauss ait eu le mal de mer. Il a gardé la cabine, mon père l’a soigné, et nous avons pu causer tout à notre aise.

Comme on le voit, Morlaix avait fait du chemin dans la confiance de la jeune fille.

Elle reprit :

— Seulement une chose m’ennuie.

— C’est fâcheux.

— Avec mes idées nouvelles, les anciennes ne s’accordent plus.

— Naturellement.

— Vous trouvez cela naturel, je crois que vous avez raison… oui, vous avez certainement raison, comme toujours… Mais je suis embarrassée, voulez-vous me conseiller ?… Vous le devez, vous m’avez