Page:Ivoi - Le Serment de Daalia.djvu/141

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fait une cervelle neuve… Près de vous, j’ai appris à penser : il faut m’apprendre à agir.

— À agir ?

Dans la voix du domestique ami, il y eut un peu d’émotion.

Certes Lisbeth apparaissait comique en son costume bariolé, mais sa confiance était touchante ; avec cela, ses cheveux blonds, ses yeux bleus auxquels des idées inaccoutumées donnaient une expression bien différente d’antan, composaient avec sa face poupine, rose et blanche, un ensemble pas désagréable du tout.

Et l’ami d’Albin se confiait in petto, que, vêtue avec goût, la jeune personne mériterait l’attention.

Comme elle redisait :

— Vous devez.

Il répliqua :

— Je ne demande pas mieux.

Ce n’était pas tout à fait cela qu’il avait voulu prononcer, mais ses lèvres avaient parlé plus vite que sa raison, et il demeura tout étonné d’avoir consenti aussi facilement à devenir en quelque sorte le directeur spirituel de sa compagne.

Nonobstant, il prit la mine grave que comporte l’emploi.

— Je vous écoute, mademoiselle Lisbeth.

Elle remercia d’un sourire :

— C’est très difficile à dire.

— Je tâcherai de comprendre à demi-mot.

— Même comme cela, c’est peu aisé… Il faudrait presque, pour me rendre la tâche facile, que vous me comprissiez sans mot du tout.

— Vous demandez l’impossible.

— Non, je ne le demande pas, car je m’explique.

La voix de Lisbeth tremblait. Morlaix eut pitié et doucement :

— Inutile. Répondez seulement par oui ou par non à mes questions.

Puis jonglant avec les appellations de fleurs, de façon aussi désinvolte que s’il n’eût jamais fait autre chose :

— Herr Niclauss vous apparaît maintenant couronné de ciguë socratique.