Page:Ivoi - Le Serment de Daalia.djvu/162

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

rectangle dans la muraille blanche, juste en face du prisonnier.

Pour l’atteindre, il était nécessaire de passer près du fauteuil occupé par la personne qui s’était chargée, un peu légèrement, de veiller la malade, et qui continuait à dormir le plus paisiblement du monde.

En toute autre circonstance, Albin l’eût secouée, admonestée sévèrement pour ce manquement absolu au devoir professionnel ; mais à l’heure présente, la chose servait trop bien ses desseins pour que le reproche jaillit de sa bouche.

— Allons ! chuchota-t-il, pour s’encourager. Dix pas à faire et je serai dans le couloir.

Dix pas, cela n’a l’air de rien ; mais c’est énorme en pareille occurrence.

Albin eût préféré franchir dix kilomètres en rase campagne, et ce lui fut une terrible émotion que de contourner le fauteuil du dormeur.

Car ce n’était point une dormeuse, comme il l’avait cru d’abord. Les cheveux noirs appartenaient à un Malais. Ce que le jeune homme avait pris pour un pan de jupe faisait partie d’une ample couverture, dont le personnage avait pris soin de s’enrouler avant de se livrer aux douceurs du repos.

Cette couverture aggravait le cas de l’infirmier volontaire, car elle accusait la préméditation de la faute.

Pourtant, Albin la remarqua à peine.

Ses regards s’étaient fixés sur le visage de l’homme immobile. Il reconnaissait le sacrificateur Oraï, entrevu au pays batta, lors des épreuves pour la conquête de la main d’Hato.

Décidément, l’aventure se compliquait.

Ce grand prêtre batta veillant l’Américaine à plusieurs centaines de kilomètres du temple de M’Prahu. Cette Américaine, qu’un instant, jadis, Gravelotte avait prise pour la fille de l’oncle François ! Pourquoi la réunion de ces deux êtres ? Pourquoi leur présence simultanée dans la même ville, dans le même hôtel ?

Un léger mouvement d’Oraï mit en déroute l’armée de points d’interrogation qui défilait sous le crâne du Français.