Page:Ivoi - Le Serment de Daalia.djvu/219

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officier de sécurité, un placide Hollandais celui-là, leur donne l’explication de son intervention.

— Vous diminuez la considération dont les blancs doivent jouir de la part des Malais, dit-il, vous êtes étrangers, sans doute ?

— En effet !

— Je m’en suis douté. Il me suffira donc de vous enseigner certaines règles dont un Européen ne doit pas s’écarter dans l’île de Java.

Et du ton doctoral d’un professeur en chaire, il enseigne aux voyageurs :
1° Qu’aucun blanc ne doit s’abaisser à se mêler à la foule ;
2° Qu’aller à pied est de mauvais goût ;
3° Que se promener, sans porte-parasol, est malséant ;
4° Que n’avoir pas de porte-feu ou porte-mèche, confine au déshonneur.
5° Que l’on devient méprisable, si l’on ne prend pas l’air hautain.

Cette petite leçon de décorum, à l’usage des blancs en villégiature à Java, terminée, le Hollandais salua les jeunes gens, leur souhaita bon voyage, et daigna même leur serrer la main.

Bien plus, il poussa la bienveillance jusqu’à les faire reconduire à la gare par quatre agents, dont deux tenaient déployés de gigantesques parasols bleus, tandis que les deux autres agitaient des baguettes de bois de santal enflammées.

Après la leçon parlée, il gratifiait les Français d’une « leçon de choses ».

En somme, il avait raison. Le parasol — payong — est le symbole de l’autorité. Qu’un général passe une revue, qu’un gouverneur rende un édit, condamne des rebelles ou pardonne aux coupables, son parasol devient, suivant le cas, l’équivalent du sabre, ou de la main de justice. Plus il est vaste, plus son possesseur est réputé puissant, plus les indigènes sont tenus de marquer d’égards.

Le parasol du gouverneur général a un mètre quatre-vingts de diamètre ; sa hampe a deux mètres de long. C’est un parasol de famille ou de voiture.