Page:Ivoi - Le Serment de Daalia.djvu/364

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Sans souci des égratignures, elle se jeta dans le taillis.

Quand, une heure après, aux cris de l’inquiète Rana, on se mit en quête de la promeneuse, il était trop tard. Daalia était bien loin du fort de Mariveles, et les éclaireurs envoyés à sa découverte, rentrèrent successivement sans avoir rien trouvé d’autre qu’une gerbe de fleurs abandonnée sur un rocher. Pour tous, il parut évident que la jeune fille s’était laissée attirer trop loin par sa cueillette, et que des rebelles, dont la présence avait été signalée depuis plusieurs jours, s’étaient emparés de sa personne.

Rana pleura, se répandant en cris aigus.

Mrs. Stiggs invectiva toute la garnison et son époux, le capitaine, plus que les autres.

Quant au capitaine, il se rendit à Manille, afin d’aviser de l’incident le gouverneur lui-même. Il démontra par A plus B que sa responsabilité se trouvait à couvert, que la jeune fille avait commis une infraction aux ordres précis donnés aux habitants de la redoute.

Ses supérieurs s’empressèrent d’admettre le bien-fondé de ses dires. On lui offrit un punch de consolation, si bien que le digne Américain, après s’être consolé pendant plusieurs heures, ne regagna Mariveles que fort tard dans la soirée, et encore en décrivant de tels zigzags que le lieutenant Craigg, un pince-sans-rire de Baltimore, lança cette monumentale plaisanterie qui, par la suite, fit fortune dans l’armée américaine :

— Le capitaine a manqué sa vocation. Il aurait dû se faire peintre, car, même en marche, il triomphe dans l’arabesque, dans le genre ornemental. Et avec cela, il n’est pas comme les vulgaires barbouilleurs. Il n’a pas besoin d’huile, lui ; il peint au rhum !