Page:Ivoi - Le Serment de Daalia.djvu/403

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dent une vague clarté. Le commandant a escompté tout cela.

— Masque les cheminées.

L’ordre est lancé…

Des prélarts tendus sur des perches s’étendent comme des écrans, interceptant le poudroiement lumineux à l’orifice des cheminées du croiseur. 

— Aveugle les feux.

Les fanaux sont éteints.

Le navire russe n’a plus une lumière qui puisse le trahir. Ombre lui-même, il file rapide dans l’ombre.

— La barre à tribord, toute !

Comme un cheval bien dressé, le Varyag tourne sur lui-même. Son étrave se dirige sur les fanaux du mystérieux convoyeur, que les lunettes permettent d’apercevoir. 

Un frisson parcourt l’équipage, les passagers. Enfin, on va donc savoir. Le steamer surpris ne pourra pas cacher son identité.

Le pont frissonne sous la trépidation de l’arbre de l’hélice, les vagues glissent avec un murmure le long des flancs du vapeur.

En avant ! En avant !

Soudain de la plate-forme de hune tombe cet avertissement :

— Ohé ! le bateau a disparu.

— Disparu !

Tout le monde tressaille. On se presse le long du bastingage. Les yeux se dilatent, cherchent à percer l’obscurité.

Et le marin qui veille, reprend :

— Il s’est éteint. On dirait qu’il a imité notre manœuvre.

Un grand silence succède à ces paroles.

Tous les regards se sont portés vers le commandant, debout sur la passerelle. Que va-t-il décider devant cette action imprévue de l’ennemi ?

D’une voix que la colère fait légèrement trembler, l’officier ordonne :

— Forcez la vapeur. Il n’a plus de fanaux, nous non plus. Tant pis si un abordage se produit.

Terrible est l’éventualité que signale ainsi le chef : mais personne ne songe à avoir peur. Les nerfs sont trop surexcités pour cela.