Page:Ivoi - Le Serment de Daalia.djvu/87

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— En effet.

— Aujourd’hui, je vous dis le contraire : réussissez.

— Mais alors, je n’aurai plus qu’à prendre la place de l’oncle François dans cette île du diable ?

— Eh ! non, Herr Niclauss. Ces sauvagesses, vous ne les ramènerez pas ici. Nous les remisons dans un pays voisin, puis nous revenons poser nos conditions à ce bon M. Gravelotte. Huit fiancées, cela vaut huit millions ; il vous en restera deux ; c’est très joli pour un homme de votre âge. Il cédera, car il est possédé du désir de revoir l’Europe, et après avoir cru toucher au but, il lui serait trop pénible d’y renoncer à jamais. Alors, nous exigeons que la somme soit expédiée ici, qu’elle nous soit présentée sur table. Puis, je pars chercher les dames battas, vous laissant en otage à la plantation.

Une grimace de Gavrelotten fit monter le rire aux lèvres de son interlocuteur.

— Attendez donc, ô le plus impatient des gendres. Je ne vais pas loin. Avec une barque, une nuit, fixée d’avance, je vous enlève, vous conduis à bord d’un navire loué d’avance, et en route pour l’Europe ! Le tour est joué.

— Mais l’argent ?

— Je pense que vous l’emporterez avec vous.

Cette fois, Niclauss ricana :

— Fortune, liberté, j’aurai tout. Dites donc, papa beau-père, si une fois à bord je pensais : « Huit fiancées pour un seul homme, c’est suffisant ; je refuse la neuvième » ?

Il s’arrêta. Fleck était devenu très grave :

— Cette supposition, Herr Niclauss, n’est évidemment qu’une plaisanterie de votre part. S’il en était autrement, ce serait très malheureux pour vous.

— Pour moi ?

— Car, continua imperturbablement le père de Lisbeth, le navire frété par moi, j’y serai maître absolu. Je pourrais donc venger l’injure faite à ma fille en vous brûlant la cervelle, et réaliser un joli inventaire en débarrassant votre cadavre des millions conquis.

— Comme vous y allez ! balbutia Niclauss, interloqué.