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Page:Ivoi - Miss Mousqueterr.djvu/326

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UN ENFER SCIENTIFIQUE.

et comme des regards ironiques, les premières étoiles scintillaient au ciel.

Ils s’étaient adossés en cercle, autour de la perche centrale soutenant le frêle édifice. Les genoux ramenés sous le menton, leurs mains crispées serrant sur eux les fourrures, ils ne faisaient plus aucun mouvement.

Dormaient-ils ?

Oui et non. Ils avaient la sensation d’un engourdissement bienfaisant, ralentissant la circulation, arrêtant la pensée, remplaçant la douleur et l’angoisse, par une indifférence paisible.

Soudain, tous subirent une commotion violente, qui les ramena au sentiment. On eût cru que leur support venait de céder, car tous se heurtèrent, se cramponnèrent les uns aux autres pour se remettre en équilibre.

Des voix faibles interrogent :

— Qu’est-ce ?

Mais le pan de la tente formant porte se soulève. Max Soleil paraît dans l’ouverture.

— D’où venez-vous ?

Il réplique doucement :

— Vous n’avez donc rien entendu ?

Son organe résonne étrangement. On y sent le grelottement d’une émotion extraordinaire.

— Entendu quoi ?

— Le rauquement du tigre.

La phrase provoque une stupeur générale.

— Un tigre à pareille altitude !

La chose apparaît folle. Le terrible félin habite les jungles à la température d’étuve, mais les sommets neigeux, les glaciers ne sauraient le tenter. Cependant, le romancier reprend :

— Cela ne vous étonne pas plus que moi. Tout à l’heure, du fond de mon engourdissement j’ai cru entendre un rauquement sourd. J’ai armé mon revolver et suis sorti.

— Eh bien ?

— La nuit est claire, au dehors la neige a conservé les empreintes…

— D’un tigre !

— Ou d’un grand félin quelconque. L’animal a tourné autour de la tente. Il s’est éloigné ensuite, a gratté le sol au pied de la pente qui nous domine, et là, là…

Le jeune homme s’arrêta une seconde.