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LES CINQ SOUS DE LAVARÈDE

liers d aiguilles, sous la poussée d’un moteur invisible, se fussent livrées à travers ses cartilages à un mouvement de va-et-vient.

— Brrr ! dit-il en se secouant, il fait frisquet.

Il se leva et rajusta sa fourrure. À ses pieds, sir Murlyton et Rachmed, recouverts d’un monceau de peaux de bêtes, demeuraient encore immobiles.

— Tiens ! reprit le jeune homme, où donc est miss Aurett ? sortie ?… Quelle honte pour notre sexe réputé fort !

Sur ces mots, il marcha vers l’entrée de la grotte.


La petite troupe s’éloigna au galop.

Un instant il s’arrêta. Au passage brusque de l’ombre à la lumière, ses yeux s’étaient fermés.

Le paysage était éblouissant. Tous les reliefs du sol recouverts de cristallisations glacées, le fleuve voisin semblable à une coulée d’argent en fusion, réfléchissaient en décuplant leur intensité les rayons mats du soleil pâli de l’hiver. On eût dit un amoncellement féerique de diamants chatoyant sous la flamme d’une lampe. C’étaient des éclairs, une débauche de raies flamboyantes, s’élançant du sol ; et par une étrange illusion d’optique, la terre paraissait éteindre le soleil.

Armand regarda, puis la pensée de l’Anglaise lui revint. Le sentier qui longeait les rocs était désert. Déserte était la rive du fleuve.

Où donc la jeune fille se cachait-elle ? Il fit quelques pas et, mordu au cœur par une soudaine inquiétude, il appela sa gracieuse compagne de voyage. Sa voix s’éteignit sans éveiller d’écho.

Il appela plus fort. Cette fois on lui répondit. Sir Murlyton, réveillé