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TOUCHER SPHÉRIQUE ET TOUCHER CONTRAIRE

toucher sphérique est donc d’une simplicité extrême comparée à celle du toucher musical ; de plus les différences d’orientation rythmique, réduites aux différences de l’élan transversal dans le toucher sphérique, s’étendent dans le toucher musical à des combinaisons rendues volontairement complexes et à des combinaisons encore bien plus complexes, acquises fatalement par le mécanisme communiqué à la pensée.

Évidemment le toucher d’une sphère est en lui-même plus suggestif que le toucher d’une surface plane comme le clavier ; mais si la bille rentre pour ainsi dire dans les pulpes, le doigt entre, si l’on peut dire ainsi, dans la touche, parce qu’il la fait reculer.

C’est par le caractère de ce recul que se produit peut-être un phénomène analogue à celui qui s’opère lorsque la bille devient le contenu et la pulpe le contenant ? Cela doit être, mais rien ne le prouve, sinon l’harmonie qui se dégage du toucher musical. Ceux qui ont entendu Liszt ont connu ces sonorités éthérées qui semblaient émaner de l’espace le plus fluide imaginable ; véritable évocation de cette musique des sphères dont Pythagore a théoriquement formulé l’existence.

Du reste, dans l’unité linéaire des groupes de touchers, les voies ouvertes dont nous avons parlé sont en principe sphériques puisqu’elles forment une courbe ; et, par l’orientation communiquée aux pressions, la position des doigts évolue corrélativement avec cette courbe ; donc, les doigts roulent sur les touches au moment de les enfoncer, et leur sphéricité doit laisser des traces dans ce roulement,