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L’UNITÉ DES PHÉNOMÈNES CÉRÉBRAUX

nelle, relativement grossière, comparées aux finesses rythmiques variées transmises à ces valeurs par l’artiste qui pense, qui crée.

En définissant l’art musical par des mesures uniformes dont les altérations sont de temps à autre surajoutées par le ritenuto et l’accelerando, on s’est écarté non seulement de la vérité artistique, mais comme nous voulons le démontrer, on s’est écarté aussi de la vérité physiologique contenue dans les mouvements volontaires de l’artiste qui pense, qui crée, en interprétant une œuvre musicale.

À travers l’élaboration lente de l’écriture musicale, plus on s’est appliqué à mesurer des combinaisons de sons complexes de l’art s’acheminant vers la polyphonie moderne, plus on s’est écarté de la vérité rythmique.

On peut dire qu’aussi longtemps que la musique est restée simple par la forme, le principe rythmique est resté complexe. Dans les neumes, origine de notre système d’écriture moderne, la mesure n’existe pas ; dans la musique grecque (dont l’affinement rythmique devait être merveilleux en raison des subtilités extraordinaires supposées inhérentes à la prononciation de la langue grecque), on intercalait le temps irrationnel entre le temps long et le temps bref, que nous avons seuls conservés. Donc, c’est à mesure que les formes de l’art se sont compliquées qu’on a fatalement dénaturé le principe du rythme ; dans la nécessité de mesurer les rapports complexes, on les a supposés uniformes pour les rendre mesurables.

Nous démontrerons plus loin raffinement que