Page:Jacques Bainville - Les Dictateurs.djvu/99

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que les exemples, — et les exemples n’étaient peut-être pas toujours très bien compris. Car il semble bien que dans la collaboration indéniable des rois et des philosophes, les rois aient eu le dessus et se soient beaucoup plus habilement servis des philosophes que ceux-ci ne se sont servis des rois. Mais enfin, Frédéric II de Prusse, la grande Catherine de Russie, et Joseph II, successeur de Marie-Thérèse aux divers trônes de Bohême et de Hongrie et au titre toujours vénéré de l’ancien Saint Empire Germanique, furent pendant de longues années des sortes de figures votives de la dictature couronnée, auxquelles les philosophes adressaient leurs prières raisonnables et même rationalistes.

Il est assez difficile de savoir ce qu’était un despote éclairé, car jamais la théorie de cette forme toute particulière de gouvernement n’a été bien clairement établie. Avant tout, le despote éclairé, guidé comme il convient par les lois de la philosophie naturelle, devait s’opposer à l’Église. Sur ce point, les philosophes eurent toute satisfaction : Frédéric II était luthérien, Catherine II était impératrice d’un pays orthodoxe, où la religion jouait un rôle immense et profond, mais où il était aisé, à cause de l’ignorance du clergé, de lui interdire tout empiétement trop grave. Quant à la famille des Habsbourg-Lorraine, il est cer-