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BOIS
BON
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Bonica, île imaginaire de l’Amérique, où Déotatus, médecin spagirique, place une fontaine dont les eaux, plus délicieuses que le meilleur vin, ont la vertu de rajeunir.

Boniface VIII, pape, élu le 24 décembre 1294. On a conté que, n’étant encore que cardinal, il fit percer une muraille qui avoisinait le lit du pape Célestin, et lui cria au moyen d’une sarbacane, qu’il eût à déposer la tiare s’il voulait être sauvé ; que le bon pape Célestin obéit à cette voix qu’il croyait venir du ciel, et céda la place à Boniface. — Mais ce récit n’est qu’une imposture entièrement supposée par les protestants, qui ont imaginé cette calomnie comme tant d’autres. La vérité est que le pape Célestin déposa la tiare pour s’occuper uniquement de son âme. Le cardinal Cajetan (depuis Boniface VIII) n’y fut pour rien[1].

Bonne aventure. Les diseurs de bonne aventure et les magiciens étaient devenus si nombreux à Rome du temps des premiers empereurs, qu’ils y avaient une confrérie. Pour l’art de dire


la bonne aventure, voy. Chiromancie, Cartomancie, Astrologie, Métoposcopie, Horoscopes, Cranologie, et les cent autres manières.

Bonnes. On appelle bonnes, dans certaines provinces, des fées bienveillantes, des espèces de farfadets femelles sans malice, qui aiment les enfants et qui se plaisent à les bercer. On a sur elles peu de détails ; mais c’est d’elles, dit-on, que vient aux berceuses le nom de bonnes d’enfants. Habondia est leur reine.

Bonnet (Jeanne), sorcière de Boissy en Forez, brûlée le 15 janvier 1583 pour s’être vantée d’avoir eu des liaisons abominables avec le diable.

Bonnet pointu, ou esprit au bonnet. Voy. Hekdeckin.

Bonnevault (Pierre). Un sorcier poitevin du seizième siècle, nommé Pierre Bonnevault, fut arrêté parce qu’il allait au sabbat. Il confessa que la première fois qu’il y avait été mené par ses parents il s’était donné au diable, à qui il avait permis de prendre ses os après sa mort ; mais qu’il n’avait pas voulu donner son âme. Un jour, venant de Montmorillon, où il avait acheté deux charges d’avoine qu’il emportait sur deux juments, il entendit des gens d’armes sur le chemin ; craignant qu’ils ne lui prissent son avoine, il invoqua le diable, qui vint à lui comme un tourbillon de vent, et le transporta avec ses deux juments à son logis. Il avoua aussi qu’il avait fait mourir diverses personnes avec ses poudres ; enfin il fut condamné à mort. Voy. Tailletroux. C’était sa femme.

Bonnevault (Jean), frère de Pierre, fut aussi, accusé de sorcellerie ; et le jour du procès, devant l’assemblée, il invoqua le diable, qui l’enleva de terre à une hauteur d’environ quatre ou cinq pieds, et le laissa retomber sur le carreau, comme un sac de laine, sans aucun bruit, quoiqu’il eût aux pieds des entraves. Etant relevé par deux archers, on lui trouva la peau de couleur bleue tirant sur le noir ; il écumait et souffrait beaucoup. Interrogé là-dessus, il répondit qu’ayant prié le diable de le tirer de peine, il n’avait pu l’enlever, attendu que, comme il avait prêté serment à la justice, le diable n’avait plus pouvoir sur lui.

Bonnevault (Mathurin), parent des deux précédents, accusé comme eux de sorcellerie, fut visité par experts. On lui trouva sur l’épaule droite une marque de la figure d’une petite rose, dans laquelle on planta une longue épingle sans qu’il en ressentît aucune douleur, d’où on le jugea bien sorcier. Il confessa qu’ayant épousé en premières noces Berthomée de la Bédouche, qui était sorcière comme ses père et mère, il l’avait vue faire sécher au four des serpents et des crapauds pour des maléfices ; qu’elle le mena alors au sabbat, et qu’il y vit le diable, ayant des yeux noirs, ardents comme une chandelle. Il dit que le sabbat se tenait quatre fois l’an : la veille de la Saint-Jean-Baptiste, la veille de Noël, le mardi-gras et la veille de Pâques. On le convainquit d’avoir fait mourir sept personnes par maléfices ; se voyant condamné, il avoua qu’il était sorcier depuis l’âge de seize ans. — Il y aurait de curieuses études à faire sur tous ces procès, si nombreux pendant les troubles sanglants de la réforme.

Bonsovanis (Barthélemi de), brave homme du diocèse de Trévise, dont un démon appelé Belzéout, quoique de rang inférieur dans son infernale hiérarchie, parvint à s’emparer en le rendant, jaloux de sa femme, qui était pieuse et

  1. Voyez l'Histoire du pape Boniface VIII, par M. l’abbé Jorry.