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quelques-uns, une sorte de maçonnerie mystérieuse ; selon d’autres, ce n’est que l’explication mystique de la Bible, l’art de trouver des sens cachés dans la décomposition des mots[1], et la manière d’opérer des prodiges par la vertu de ces mots prononcés d’une certaine façon. Voyez Thémura et Théomancie. Cette science merveilleuse, si l’on en croit les rabbins, affranchit ceux qui la possèdent des faiblesses de ¡’humanité, leur procure des biens surnaturels, leur communique le don de prophétie, le pouvoir de faire des miracles, et l’art de transmuer les métaux en or, c’est-à-dire la pierre philosophale. Elle leur apprend aussi que le monde sublunaire ne doit durer que sept mille ans, et que tout ce qui est supérieur à la lune en doit durer quarante-neuf mille.


Caacrinolaas
Caacrinolaas
Caacrinolaas.


Les Juifs conservent la cabale par tradition orale ; ils croient que Dieu l’a donnée à Moïse, au pied du mont Sinaï ; que le roi Salomon, auteur d’une figure mystérieuse que l’on appelle l’arbre de la cabale des Juifs, y a été très-expert, et qu’il faisait des talismans mieux que personne. Tostat dit même que Moïse ne faisait ses miracles avec sa verge que parce que le grand nom de Dieu y était gravé. Valderame remarque que les apôtres faisaient pareillement des miracles avec le nom de Jésus, et les partisans de ce système citent plusieurs saints dont le nom ressuscita des morts.

La cabale grecque, inventée, dit-on, par Pythagore et par Platon, renouvelée par les Valentiniens, tira sa force des lettres grecques combinées et fit des miracles avec l’alphabet.

La grande cabale, ou la cabale dans le sens moderne proprement dite, est l’art de commercer avec les esprits élémentaires ; elle tire parti pour cela de certains mots mystérieux. Elle explique les choses les plus obscures par les nombres, par le changement de l’ordre des lettres et par des rapports dont les cabalistes se sont formés des règles. Or, voici quels sont, selon les cabalistes, les divers esprits élémentaires :

Les quatre éléments sont habités chacun par des créatures particulières, beaucoup plus parfaites que l’homme, mais soumises comme lui aux lois de la mort. L’air, cet espace immense qui est entre la terre et les deux, a des hôtes plus nobles que les oiseaux et les moucherons. Ces mers si vastes ont d’autres habitants que les dauphins et les baleines. Les profondeurs de la terre ne sont pas destinées aux-taupes seulement et l’élément du feu, plus sublime encore que les trois autres, n’a pas été fait pour demeurer inutile et vide.

Les salamandres habitent donc la région du feu ; les sylphes, le vague de l’air ; les gnomes, l’intérieur de la terre ; et les ondins ou nymphes, le fond des eaux. Ces êtres sont composés des plus pures parties des éléments qu’ils habitent Adam, plus parfait qu’eux tous, était leur roi naturel ; mais, depuis sa faute, étant devenu impur et grossier, il n’eut plus de proportion avec ces substances ; il perdit tout l’empire qu’il avait sur elles.

Que l’on se console pourtant ; on a trouvé dans la nature les moyens de ressaisir ce pouvoir perdu. Pour recouvrer la souveraineté sur les salamandres, et les avoir à ses ordres, on attire le feu du soleil, par des miroirs concaves, dans un globe de verre ; il s’y forme une poudre solaire qui se purifie elle-même des autres éléments, et qui, avalée, est souverainement propre a exhaler le feu qui est en nous, et à nous faire devenir pour ainsi dire de matière ignée. Dès lors, b habitants de la sphère du feu deviennent nos inférieurs, et ont pour nous toute l’affection qu’ils ont pour leurs semblables, tout le respect qu’ils doivent au lieutenant de leur créateur.

De même, pour commander aux sylphes, ans gnomes, aux nymphes, on emplit d’air, de Lèvre ou d’eau, un globe de verre ; on le laisse, bien fermé, exposé au soleil pendant un mois. Chacun de ces éléments, ainsi purifié, est un aimant qui attire les esprits qui lui sont propres.

Si on prend tous les jours, durant quelques mois, de la drogue élémentaire, formée, aimée qu’on vient de le dire, dans le bocal ou globe de

    ment pour le nom de cabale qu’il trouvait dans les ouvrages de ce prince. On demanda à ce critique ce qui l’indignait si fort dans ce mot de cabale. — Ne savez-vous pas, répondit le stupide, que ce Cabale était un scélérat tout à fait diabolique, qui eut l’impiété d’écrire beaucoup de choses contre Jésus-Christ même, qui forma une hérésie détestable et dont les sectateurs s’appellent encore cabalistes ? » (Gabriel Naudé, Apologie pour les grands personnages accusés de magie. Adrien Baillet, Jugements des savants. Chap. xiii, § 2 des Jugements sur les livres en général.)

  1. Voyez Abdeel.