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extravagances dont leur folle imagination est remplie. Tout le monde a entendu parler des convulsions et des merveilles absurdes qui eurent lieu, dans la capitale de la France, sur le tombeau du diacre Paris, homme inconnu pendant sa vie, et trop célèbre après sa mort[1]. La frénésie fanatique alla si loin, que le gouvernement fut obligé, en 1732, de fermer le cimetière Saint-Médard, où Paris était enterré. Sur quoi un plaisant fit ces deux vers :

         De par le roi, défense à Dieu,
         D’opérer miracle en ce lieu.

Dès lors les convulsionnaires tinrent leurs séances dans des lieux particuliers et se donnèrent en spectacle certains jours du mois. On accourait pour les voir, et leur réputation surpassa bientôt celle des bohémiens ; puis elle tomba, tuée par l’excès et le ridicule.

Copernic, astronome célèbre, mort en 1543. On dit communément que son système fut condamné par la cour de Rome : ce qui est faux et controuvé. Il vivait à Rome d’un bon canonicat et y professait librement l’astronomie. Mais voyez à ce sujet l’article Galilée.

Coq. Le coq a, dit-on, le pouvoir de mettre en fuite les puissances infernales ; et comme on a remarqué que le démon, qu’on appelle le lion d’enfer, disparaît dès qu’il voit ou entend le coq, on a répandu aussi cette opinion que le chant ou la vue du coq épouvante et fait fuir le lion. C’est du moins le sentiment de Pierre Delancre. « Mais il faut répondre à ces savants, dit M. Salgues[2], que nous avons des lions dans nos ménageries ; qu’on leur a présenté des coqs ; que ces coqs ont chanté, et qu’au lieu d’en avoir peur, les lions n’ont témoigné que le désir de croquer l’oiseau chanteur ; que toutes les fois qu’on a mis un coq dans la cage d’un lion, loin que le coq ait tué le lion, c’est au contraire le lion qui a mangé le coq. » On sait que tout disparaît au sabbat aussitôt que le coq chante. On cite plusieurs exemples d’assemblées de démons et de sorcières que le premier chant du coq a mises en déroute ; on dit même que ce son, qui est pour nous, par une sorte de miracle perpétuel, une horloge vivante, force les démons, dans les airs, à laisser tomber ce qu’ils portent : c’est à peu près la vertu qu’on attribue au son des cloches. Pour empêcher le coq de chanter pendant leurs assemblées nocturnes, les sorciers, instruits par le diable, ont soin de lui frotter la tête et le front d’huile d’olive, ou de lui mettre au cou un collier de sarment.

Beaucoup d’idées superstitieuses se rattachent à cet oiseau, symbole du courage et de la vigilance, vieil emblème des Gaulois. On dit qu’un jour Vitellius rendant la justice à Vienne en Dauphiné, un coq vint se percher sur son épaule ; ses devins décidèrent aussitôt que l’empereur tomberait sûrement sous un Gaulois ; et, en effet, il fut vaincu par un Gaulois de Toulouse.

On devinait les choses futures par le moyen du coq. Voy. Alectryomancie. On dit aussi qu’il se forme dans l’estomac des coqs une pierre qu’on nomme pierre alectorienne, du nom grec de l’animal. Les anciens accordaient à cette pierre la propriété de donner le courage et la force : c’est à sa vertu qu’ils attribuaient la force prodigieuse de Milon de Crotone. On lui supposait encore le don d’enrichir, et quelques-uns la regardaient comme un philtre qui modérait la soif. On pensait autrefois qu’il y avait dans le coq des vertus propres à la sorcellerie. On disait qu’avant d’exécuter ses maléfices, Léonora Galigaï ne mangeait que des crêtes de coq et des rognons de bélier qu’elle avait fait charmer. On voit dans les accusations portées contre elle qu’elle sacrifiait des coqs aux démons[3].

Certains juifs, la veille du chipur ou jour du pardon, chargent de leurs péchés un coq blanc qu’ils étranglent ensuite, qu’ils font rôtir, que personne ne veut manger, et dont ils exposent les entrailles sur le toit de leur maison. On sacrifiait, dans certaines localités superstitieuses, un coq à saint Christophe, pour en obtenir des guérisons. On croyait enfin que les coqs pondaient des œufs, et que, ces œufs étant maudits, il en sortait un serpent ou un basilic. « Cette superstition fut très-répandue en Suisse ; et dans une petite chronique de Bâle, Gross raconte sérieusement qu’au mois d’août 1474 un coq de cette ville, ayant été accusé et convaincu de ce crime, fut condamné à mort. Le bourgeois le brûla publiquement avec son œuf, dans un endroit nommé Kablenberg, à la vue d’une grande multitude de personnes[4]. » Voy. Basilic, Mariage, etc.

Corail. Quelques auteurs ont écrit que le corail a la vertu d’arrêter le sang et d’écarter les mauvais génies. Marsile Ficin prétend que le corail éloigne les terreurs paniques et préserve de la foudre et de la grêle. Lucéti en donne cette raison, que le corail exhale une vapeur chaude qui, s’élevant en l’air, dissipe tout ce qui peut causer la grêle ou le tonnerre. Brown, dans ses Essais sur les erreurs populaires, dit qu’il est tenté de croire que l’usage de mettre des colliers de corail au cou des enfants, dans l’espérance de leur faire sortir les dents, a une origine su-

  1. Carré de Mongeron a recueilli ces merveilles en trois gros volumes in-4o, avec figures. Voici un de ces miracles rapporté dans une chanson de madame la duchesse du Maine :

                Un décroteur à la royale,
                Du talon gauche estropié,
                Obtint, par grâce spéciale,
                D’être boiteux de l’autre pié.

    Voyez le cimetière de Saint-Médard, dans les Légendes infernales.

  2. Des erreurs et des préjugés, etc., préface.
  3. M. Garinet, Hist, de la magie en France, p. 400.
  4. Dictionnaire d’anecdotes suisses, p. 414.