Page:Jacques Collin de Plancy - Dictionnaire infernal.pdf/216

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
DES
DEV
― 208 ―

s’approcher assez pour savoir quel pouvait être l’auteur de cette farce un peu sombre. Plusieurs soldats de patrouille et de garde en avaient été épouvantés. Mais enfin la terreur cessa : un intrépide eut le courage de s’avancer sur la place ; il empoigna le spectre et le conduisit au corps de garde, où l’on reconnut que ce revenant était le frère de Desrues, riche aubergiste de Senlis, qui était devenu fou de désespoir.

Destinée. Voy. Fatalisme.

Desvignes, Parisienne qui avait, au commencement du dix-septième siècle, des attaques de nerfs dont elle voulut tirer parti pour se faire une ressource. Les uns la disaient sorcière ou possédée, les autres la croyaient prophétesse. Le père Lebrun, qui parle d’elle dans son Histoire des superstitions, reconnut, comme les médecins, qu’il y avait dans son fait une grande fourberie. Le bruit qu’elle avait fait tomba subitement.

Detsail. Voy. Dersail.

Deuil. Les premiers poètes disaient que les âmes, après la mort, allaient dans le sombre empire ; c’est peut-être conformément à ces idées, dit Saint-Foix, qu’ils crurent que le noir était la couleur du deuil. Les Chinois et les Siamois choisissent le blanc, croyant que les morts deviennent des génies bienfaisants. En Turquie, on porte le deuil en bleu ou en violet ; en gris chez les Éthiopiens ; on le portait en gris de souris au Pérou quand les Espagnols y entrèrent. Le blanc, chez les Japonais, est la marque du deuil, et le noir est celle de la joie. En Castille, les vêtements de deuil étaient autrefois de serge blanche. Les Perses s’habillaient de brun et se rasaient avec toute leur famille et tous leurs animaux. Dans la Lycie, les hommes portaient des habits de femme pendant tout le temps du deuil. Chez nous, Anne de Bretagne, femme de Louis XII, changea en noir le deuil, qui jusquelà avait été porté en blanc à la cour. À Argos on s’habillait de blanc et on faisait de grands festins. À Délos on se coupait les cheveux, qu’on mettait sur la sépulture du mort. Les Égyptiens se meurtrissaient la poitrine et se couvraient le visage de boue. Ils portaient des vêtements jaunes ou feuille-morte. Chez les Romains, les femmes étaient obligées de pleurer la mort de leurs maris, et les enfants celle de leur père, pendant une année entière. Les maris ne pouvaient pleurer leurs femmes ; et les pères n’avaient droit de pleurer leurs enfants que s’ils avaient au moins trois ans. Le grand deuil des Juifs dure un an ; il a lieu à la mort des parents. Les enfants ne s’habillent pas de noir ; mais ils sont obligés de porter toute l’année les habits qu’ils avaient à la mort de leur père, sans qu’il leur soit permis d’en changer, quelque déchirés qu’ils soient. Ils jeûnent tous les ans à pareil jour. Le deuil moyen dure un mois ; il a lieu à la mort des enfants, des oncles et des tantes. Ils n’osent, pendant ce temps, ni se laver, ni se parfumer, ni se raser la barbe, ni même se couper les ongles ; ils ne mangent point en famille. Le petit deuil dure une semaine : il a lieu à la mort du mari ou de la femme. En rentrant des funérailles, l’époux en deuil se lave les mains, déchausse ses souliers et s’assied à terre, se tenant toujours en cette posture, et ne faisant que gémir et pleurer, sans travailler à quoi que ce soit jusqu’au septième jour. Ces usages n’ont lieu que chez les Juifs pur sang. Les Chinois en deuil s’habillent de grosse toile blanche, coupent leur queue et pleurent pendant trois mois. Le magistrat n’exerce pas ses fonctions ; le plaideur suspend ses procès. Les jeunes gens vivent dans la retraite, ne peuvent se marier qu’après trois années et n’écrivent qu’à l’encre bleue pendant un an. Le deuil des Caraïbes consiste à se couper les cheveux et à jeûner rigoureusement jusqu’à ce que le corps du défunt qu’ils pleurent soit pourri ; après quoi ils font la débauche pour chasser toute tristesse de leur esprit. Chez certains peuples de l’Amérique, le deuil était conforme à l’âge du mort. On était inconsolable à la mort des enfants et on ne pleurait presque pas les vieillards. Le deuil des enfants, outre sa durée, était commun, et ils étaient regrettés de tout le canton où ils étaient nés. Le jour de leur mort, on n’osait pas approcher des parents, qui faisaient un bruit effroyable dans leur maison, se livraient à des accès de fureur, hurlaient comme des désespérés, s’arrachaient les cheveux, se mordaient, s’égratignaient tout le corps. Le lendemain ils se renversaient sur un lit qu’ils trempaient de leurs larmes. Le troisième jour ils commençaient les gémissements qui duraient toute l’année, pendant laquelle le père et la mère ne se lavaient jamais. Le reste de la ville, pour compatir à leur affliction, pleurait trois fois le jour, jusqu’à ce qu’on eût porté le corps à la sépulture[1]. Voy. Funérailles.

Deumus ou Deumo, divinité des habitants de Calicut, au Malabar. Cette divinité, qui n’est qu’un diable adoré sous le nom de Deumus, a une couronne, quatre cornes à la tête et quatre dents crochues à la bouche, qui est fort grande ; elle a le nez pointu et crochu, les pieds en pattes de coq, et tient entre ses griffes une âme qu’elle semble prête à dévorer[2].

Dévadi, pénitent hindou de noble race, qui avait reçu de ses dieux le privilège de rajeunir les vieillards.

Devaux, sorcier du seizième siècle, à qui Ton trouva une marque sur le dos, de la forme d’un chien noir. Lorsqu’on lui enfonçait une épingle dedans, il n’en éprouvait aucune dou-

  1. Muret, Des cérémonies funèbres, etc.
  2. Leloyer, Histoire des spectres ou Apparitions des esprits, liv. III, ch. iv, p. 207.