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forts et se vengent. Dans le royaume de Loango, les albinos passent pour des démons champêtres et obtiennent quelque considération à ce titre.

Vossius dit qu’il y a dans la Guinée des peuplades d’albinos. Mais comment ces peuplades subsisteraient-elles, s’il est vrai que ces infortunés ne se reproduisent point ?

Il paraît que les anciens connaissaient les albinos. « On assure, dit Pline, qu’il existe en Albanie des individus qui naissent avec des cheveux blancs, des yeux de perdrix, et ne voient clair que pendant la nuit. » Il ne dit pas que ce soit une nation, mais quelques sujets affectés d’une maladie particulière. « Plusieurs animaux ont aussi leurs albinos, ajoute M. Salgues ; les naturalistes ont observé des corbeaux blancs, des merles blancs, des taupes blanches ; leurs yeux sont rouges, leur peau est plus pale et leur organisation plus faible[1]. »

Alborak. Voy. Borak.

Albumazar, astrologue du neuvième siècle, né dans le Khorassan, connu par son traité astrologique intitulé Milliers d’années, où il affirme que le monde n’a pu être créé que quand les sept planètes se sont trouvées en conjonction dans le premier degré du Bélier, et que la fin du monde aura lieu quand ces sept planètes, qui sont aujourd’hui (en 1862) au nombre de cinquante et une, se rassembleront dans le dernier dégrèves Poissons. On a traduit en latin et imprimé d’Albumazar le Tractatus florum astrologiæ, in-4o, Augsbourg, 1488. On peut voir dans Casiri, Biblioth. arab. hispan., t. Ier, p. 351, le catalogue de ses ouvrages.

Albunée, sibylle célèbre. On voit encore son temple à Tivoli, en ruines, il est vrai. Voy. Sibylles.

Alchabitius. Voy. Abd-el-Azys.

Alchimie. L’alchimie ou chimie par excellence, qui s’appelle aussi philosophie hermétique, est cette partie éminente de la chimie qui s’occupe de l’art de transmuer les métaux. Son résultat, en expectative, est la pierre philosophale. Voy. Pierre philosophale et Gobineau.

Alchindus, que Wierus[2] met au nombre des magiciens, mais que Delrio[3] se contente de ranger parmi les écrivains superstitieux, était un médecin arabe du onzième siècle qui employait comme remède les paroles charmées et les combinaisons de chiffres. Des démonologues l’ont déclaré suppôt du diable, à cause de son livre intitulé Théorie des arts magiques, qu’ils n’ont point lu. Jean Pic de la Mirándole dit qu’il ne connaît que trois hommes qui se soient occupés de la magie naturelle et permise : Alchindus, Roger Bacon et Guillaume de Paris. Alchindus était simplement un peu physicien dans des temps d’ignorance. À son nom arabe Alcendi, qu’on a latinisé, quelques-uns ajoutent le prénom de Jacob ; on croit qu’il était mahométan. — On lui reproche d’avoir écrit des absurdités. Par exemple, il pensait expliquer les songes en disant qu’ils sont l’ouvrage des esprits élémentaire qui se montrent à nous dans le sommeil et nous représentent diverses actions fantastiques, comme des acteurs qui jouent la comédie devant le public ; ce qui n’est peut-être pas si bête.

Alcoran. Voy. Koran.

Alcyon. Une vieille opinion, qui subsiste encore chez les habitants des côtes, c’est que l’alcyon ou martin-pêcheur est une girouette naturelle, et

 
Alcyon
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que, suspendu par le bec, il désigne le côté d’où vient le vent, en tournant sa poitrine vers ce point de l’horizon. Ce qui a mis cette croyance en crédit parmi le peuple, c’est l’observation qu’on a faite que l’alcyon semble étudier les vents et les deviner lorsqu’il établit son nid sur les îlots, vers le solstice d’hiver. Mais cette prudence est-elle dans l’alcyon une prévoyance qui lui soit particulière ? N’est-ce pas simplement un instinct de la nature qui veille à la conservation de cette espèce ? « Bien des choses arrivent, dit Brown, parce que le premier moteur l’a ainsi arrêté, et la nature les exécute par des voies qui nous sont inconnues. »

C’est encore une ancienne coutume de conserver les alcyons dans des coffres, avec l’idée qu’ils préservent des vers les étoffes de laine. On n’eut peut-être pas d’autre but en les pendant au plafond des chambres. « Je crois même, ajoute Brown, qu’en les suspendant par le bec on n’a pas suivi la méthode des anciens, qui les suspendaient par le dos, afin que le bec marquât les vents. Car c’est ainsi que Kirker a décrit l’hirondelle de mer. » Disons aussi qu’autrefois, en conservant cet oiseau, on croyait que ses plumes se renouvelaient comme s’il eut été vivant, et c’est ce qu’Albert le Grand espéra inutilement dans ses expériences[4].

Outre les dons de prédire le vent et de chasser les vers, on attribue encore à l’alcyon la précieuse qualité d’enrichir son possesseur, d’entretenir l’union dans les familles et de communiquer la beauté aux femmes qui portent ses plumes. Les Tartares et les Ostiaks ont une très-grande vénération pour cet oiseau. Ils recherchent ses plumes

  1. Des erreurs et des préjugés, etc., t. I, p. 479.
  2. De præstigiis, lib. II, cap. iii.
  3. Disquisit. magicæ, lib. I, cap. iii.
  4. Brown, Erreurs populaires, liv. III, ch. x.