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ÉLÉ
ELF
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les cymbales retentirent avec leurs sons aigres et perçants. J’étais assez commodément placé. Un cortège de talapoins commença à défiler ; ces prêtres avaient l’air grave et s’avançaient lentement. Une triple rangée de soldats entourait le noble animal, qui avait un air maladif et marchait difficilement. — On cria à mes côtés : Voilà celui qui l’a pris. — Je regardai et vis un petit homme borgne et bossu qui tenait un des nombreux rubans dorés passés au cou de l’éléphant ; cet homme était mon domestique, Tungug-Poura. Le voilà donc gendre du roi. Il vint me voir un jour en palanquin et me parut fort content de sa nouvelle position. L’éléphant blanc qui a fait sa fortune se présenta à lui à cinquante journées de marche de Juthia, dans un marais où il était couché, abattu par une fièvre à laquelle les animaux de cette espèce sont sujets ; car leur couleur blanche est, comme on sait, le résultat d’une maladie. Tungug-Poura s’approcha de l’éléphant, le nettoya, versa de l’eau sur les plaies et les boutons du dos, et prodigua tellement ses soins et ses caresses à l’intelligente bête que celle-ci lécha Tungug de sa trompe et se mit à le suivre avec la docilité d’un petit chien. Tungug est ainsi parvenu, favorisé d’abord par un hasard presque inespéré, à s’emparer d’un éléphant blanc. Le pauvre bossu a maintenant des esclaves et possède la princesse dont le nom signifie en langue siamoise les yeux de la nuit. »

Éléphant-Dieu. Voy. Kosaks.

Elfdal, vallée des Elfes dans la Suède. Là on faisait subir des épreuves aux enfants qu’on voulait initier au sabbat. On les menaçait de les jeter dans des fondrières s’ils refusaient de renoncer à Dieu. Dans les procédures qui eurent lieu contre eux, plusieurs de ces enfants déclarèrent que souvent un ange blanc s’en venait au devant d’eux et leur défendait de faire ce que le démon leur demandait.


La reine des Elfes.

Elfes, génies Scandinaves. On croit aux bords de la Baltique qu’il y a un roi des Elfes, lequel règne à la fois sur l’île de Stern, sur celle de Mœ et sur celle de Rugen. Il a un char attelé de quatre étalons noirs. Il s’en va d’une île à l’autre en traversant les airs ; alors on distingue très-bien le hennissement de ses chevaux, et la mer est toute noire. Ce roi a une grande armée à ses ordres ; ses soldats ne sont autre chose que les grands chênes qui parsèment l’île. Le jour ils sont condamnés à vivre sous une écorce d’arbre ; mais la nuit ils reprennent leur casque et leur épée et se promènent fièrement au clair de la lune. Dans les temps de guerre, le roi les assemble autour de lui. On les voit errer au-dessus de la côte, et alors malheur à celui qui tenterait d’envahir le pays[1] ! La tradition des bons et des mauvais anges est sensible dans les fictions de l’Edda. Snorro Sterlason nous apprend que les elfs de la lumière, dont Ben Johnson a fait les esprits blancs de ses masques, séjournent dans Alf-Heim (demeure des Elfs), le

  1. M. Marmier, Traditions de la Baltique.